Décisions de la grande chambre de recours

Si le droit positif est contenu principalement dans la convention et dans son règlement d’exécution, il ne faut pas négliger de regarder les éclaircissements donnés par la Grande Chambre de Recours sur les différents textes.

Voici donc la liste, par numéro, des décisions de la Grande Chambre (mise à jour le 28/03/14).

Table des matières

G1/83 – Deuxième application thérapeutique

La décision G1/83 a été rendue le 05 décembre 1984.

La question qui se posait à la Grande Chambre était de savoir si une revendication visant « l’utilisation d’un composé destiné à une utilisation thérapeutique » pouvait être acceptée. Cette question était cruciale pour les industriels du médicament.

Dans un premier temps (point 13 des motifs), la Grande Chambre rappelle que toute formulation « Utilisation d’une substance pour le traitement du corps humain ou animal » reviendrait à revendiquer une méthode thérapeutique pourtant considérée comme une non-invention (A52(4) CBE73 et aujourd’hui exclue de la brevetabilité par A53 c) CBE) : une telle formulation est donc à exclure.

En revanche, la Grande Chambre de recours indique que la formulation « Utilisation d’un composé X afin d’obtenir un médicament destiné à une utilisation thérapeutique Y » est acceptable puisqu’aucune exclusion ne s’applique à la fabrication de médicaments. Bien entendu, il est nécessaire que l’utilisation Y soit nouvelle et inventive (point 23 des motifs).

Cette dernière formulation est appelée « revendication de type suisse » .

On notera que cette décision n’est plus valide du fait du changement de l’article A54(5) CBE, qui autorise explicitement une seconde application thérapeutique.

La décision G2/08 est venue confirmer la fin des revendications de types suisse.

G5/83 – Deuxième application thérapeutique

La décision G5/83 (5 décembre 1984) est en tout point semblable à la décision G1/83 (sauf qu’elle a été rédigée en anglais).

G6/83 – Deuxième application thérapeutique

La décision G6/83 (5 décembre 1984) est en tout point semblable à la décision G1/83 (sauf qu’elle a été rédigée en français).

G1/84 – Opposition par le titulaire

La décision G1/84 a été rendue le 24 juillet 1985.

En l’espèce, le titulaire d’un brevet avait formé une opposition sur son propre brevet et cette opposition avait été déclarée irrecevable.

La Grande Chambre s’oppose à cette irrecevabilité en précisant qu’une opposition n’est pas irrecevable du seul fait qu’elle a été formée par le titulaire dudit brevet (point 8 des motifs).

En effet, il semble être souhaitable de permettre à toute personne (A99(1) CBE73) de faire opposition afin de « garantir dans toute la mesure du possible que l’Office européen ne délivrera et ne maintiendra en vigueur des brevets européens que si ceux-xi sont jugés valables » même si cette opposition est formée par le titulaire souhaitant limiter son brevet (point 3 des motifs).

On notera que cette décision n’est plus valide depuis la décision G9/93 qui renverse cette jurisprudence au motif que l’A99 CBE73 prévoit de manière constante que la procédure d’opposition est une procédure inter-partes (notamment A99(4) CBE73).

G1/86 – Rétablissement d’un opposant dans ses droits

La décision G1/86 a été rendue le 24 juin 1987.

Comme vous le savez, lors du dépôt d’un recours sur opposition, un opposant ou le titulaire peut former un recours en déposant un acte de recours (dans un délai de 2 mois à compter des motifs, A108 CBE73 ou A108 CBE) puis en déposant un mémoire (dans un délai de 4 mois à compter des motifs).

Si la lettre de l’A122(1) CBE73 (i.e. « Le demandeur ou le titulaire d’un brevet européen ») permet au titulaire de bénéficier d’une restitutio in integrum, qu’en est-il pour l’opposant ?

La Grande Chambre indique qu’il ne faut pas avoir une lecture stricte de l’A122(1) CBE73. Ainsi, un opposant peut être rétabli dans ses droits au titre de l’A122(1) CBE73 s’il n’a pas déposé dans les délais le mémoire exposant les motifs du recours (point 15 des motifs), car toute autre interprétation serait contraire au principe d’égalité (point 3 des motifs).

Attention, l’opposant ne bénéficie pas des dispositions de l’A122(1) CBE73 pour le délai de formation du recours (i.e. le premier délai de 2 mois pour déposer l’acte de recours, voir point 5 des motifs). Si le titulaire bénéficie pourtant d’un rétablissement dans ses droits pour les deux délais précités, la Grande Chambre explique ce « favoritisme » par le fait que :

  • le titulaire ne peut pas rester dans l’incertitude pendant une grande période concernant l’étendue de ses droits ;
  • l’opposant peut toujours mener une action en nullité.

L’A122 CBE étant sensiblement identique, cette décision reste a priori applicable avec la CBE 2000.

G1/88 – Silence de l’opposant

La décision G1/88 a été rendue le 27 janvier 1989.

Supposons la situation suivante : un opposant n’a pas, après avoir reçu une notification selon R58(4) CBE73 (aujourd’hui R82(1) CBE), présenté d’observation dans un délai d’un mois sur le texte dans lequel l’OEB envisage de maintenir le brevet.

Pour autant, cela signifie-t-il que l’opposant est d’accord avec ce texte (« Qui tacet consentire videtur« ) et cela rend-il irrecevable un éventuel recours de l’opposant ?

La Grande Chambre considère qu’il serait disproportionné de sanctionner l’opposant silencieux et de lui retirer son droit de recours (point 7 des motifs). En effet, parmi de multiples arguments, la Grande Chambre souligne que cette sanction ne serait simplement pas dans l’esprit de la CBE :

  • lorsque l’omission d’un acte entraine une perte de droit, la CBE le prévoit explicitement (point 3.1 des motifs) ;
  • il serait alors nécessaire d’envoyer une notification de perte de droit (R69(1) CBE73 ou maintenant R112(1) CBE) ce qui n’est pas le cas en l’espèce (point 3.2 des motifs).

G2/88

La décision G2/88 a été rendue le 11 décembre 1989.

Comme vous pouvez le constater, de nombreuses questions ont été posées à la Grande Chambre.

Changement de catégories de revendications

En l’espèce, le titulaire des droits avait cherché, en cours d’opposition, à modifier la catégorie d’une revendication. Cette modification est-elle acceptable et non contraire à l’A123(2) CBE73.

La Grande Chambre indique que le changement de catégorie (ex. « composé » ou « utilisation du composé« ), que cela survienne en examen ou en opposition (sans qu’il y ait besoin de regarder un quelconque droit national, voir point 3.3 des motifs), n’est a priori pas prohibé, mais il faut analyser, in concreto, si une extension de portée survient du fait de ce changement (point 4.1 des motifs).

Par exemple, une transformation d’une revendication de « composé » en une revendication d’ « utilisation de ce composé » en vue d’obtenir un effet donné n’est pas contraire à l’A123(2) CBE73 (point 5.1 des motifs). Attention, car si la revendication d’utilisation vise l’obtention d’un produit, celle-ci serait interdite, car elle permettrait de protéger ce produit du fait des dispositions de l’A64 CBE73.

Deuxième application non thérapeutique

En l’espèce, une revendication visait l’utilisation d’un additif parfaitement connu afin de réduire les frottements dans un moteur. Cet effet n’était pas connu, car cet additif n’était connu que pour limiter la corrosion.

L’A54 CBE73 doit-il être interprété comme autorisant une revendication d’utilisation lorsque la seule caractéristique nouvelle réside dans le but assigné à cette utilisation ?

La Grande Chambre de recours estime que « l’utilisation nouvelle d’un composé connu » vise, en réalité, l’obtention d’un nouvel effet technique sous-tendant la nouvelle utilisation (voir point 9 des motifs). En conséquence, une nouvelle caractéristique technique implicite (i.e. la fonction qui consiste dans la réalisation du but recherché) est présente dans la revendication (point 9.1 des motifs).

Au final, « l’utilisation nouvelle d’un composé connu » est donc validée par la Grande Chambre (voir point 10.3 des motifs).

G4/88 – Transfert d’opposition

La décision G4/88 a été rendue le 24 avril 1989.

La question qui était posée à la Grande Chambre était de savoir si une opposition pouvait être :

  • seulement transmise aux héritiers de l’opposant décédé ;
  • librement cédée ;
  • cédée avec l’entreprise ou une partie de l’entreprise intéressée par le domaine de l’invention considérée.

Pour la Grande Chambre (point 6 des motifs), il est clair que la transmission de l’opposition est réalisée « naturellement » lors d’une cession d’une partie de l’entreprise (comprise dans son sens le plus large, au sens économique, point 5 des motifs), car l’opposition constitue un accessoire de cette partie de l’entreprise si l’opposition a été engagée dans l’intérêt de cette partie (voir dispositif des motifs).

G5/88 – Pouvoir du Président de l’OEB pour conclure des accords administratifs

La décision G5/88 a été rendue le 16 novembre 1990.

Pour la petite histoire, l’Office allemand des brevets (Gitschiner Straße 97, 10969 Berlin) et l’Office Européen des Brevets (Gitschiner Strasse 103, 10969 Berlin) possèdent des locaux voisins à Berlin.

Office allemand et européen à Berlin
Office allemand et européen à Berlin Office allemand et européen à Berlin

Ainsi, très fréquemment, des petits étourdis déposaient des demandes européennes (ou tout autre document comme des documents d’opposition) à l’Office allemand et réciproquement.

Le président de l’OEB avait cherché à pallier ce problème en concluant le 29 juin 1981 un accord administratif avec l’Office allemand. Cet accord prévoit notamment que les documents remis à l’Office allemand seraient présumés avoir été reçus par l’OEB à la date de réception de l’Office allemand.

En l’espèce, une opposition avait été déposée auprès de l’Office allemand, mais reçue par l’OEB après le délai de 9 mois. Nous comprenons bien que le titulaire souhaite voir cette opposition déclarée irrecevable.

La question posée à la Grande Chambre de recours était donc de savoir si le président de l’OEB avait le pouvoir de conclure un tel accord ayant un impact sur les droits conférés par la CBE. Il est à noter que cet accord n’a pas été approuvé par le conseil d’administration.

Selon la Grande Chambre, ni le pouvoir de représentation du Président défini par l’A5(3) CBE73 (point 2.2. des motifs), ni son obligation de prendre « toutes mesures utiles… en vue d’assurer le fonctionnement de l’Office européen des brevets » de l’A10(2) CBE73 (points 2.6 et 2.7 des motifs) ne permettent de justifier un tel accord.

Néanmoins, dans un principe de « protection de la bonne foi et de la confiance légitime » , la Grande Chambre décida que la non-efficacité de l’accord ne serait pas rétroactive.

G6/88 – Deuxième application non thérapeutique

La décision G6/88 a été rendue le 11 décembre 1989.

Cette décision reprend les mêmes motifs que la décision G2/88 rendue le même jour.

G7/88 – Pouvoir du Président de l’OEB pour conclure des accords administratifs

La décision G7/88 a été rendue le 16 novembre 1990.

Cette décision reprend les mêmes motifs que la décision G5/88 rendue le même jour.

G8/88 – Pouvoir du Président de l’OEB pour conclure des accords administratifs

La décision G8/88 a été rendue le 16 novembre 1990.

Cette décision reprend les mêmes motifs que la décision G5/88 rendue le même jour.

G1/89 – Non-unité a posteriori et demande PCT

La décision G1/89 a été rendue le 2 mai 1990.

Dans cette décision, la Grande Chambre rappelle que (voir point 3. des motifs), même au stade de la recherche PCT, la division de la recherche agissant en tant qu’ISA doit bien apprécier la nouveauté et l’activité inventive des revendications afin d’apprécier l’unité d’invention conformément à l’A17.3.a PCT (quand bien même cette appréciation ne constitue pas un véritable « examen » au sens de la CBE ou du PCT).

En conséquence, il est tout à fait possible pour l’ISA de formuler des objections de non-unité a posteriori (point 5 des motifs) et se faisant l’OEB peut demander au demandeur le paiement d’une taxe additionnelle de recherche (point 7 des motifs).

G2/89 – Non-unité a posteriori et demande PCT

La décision G2/89 a été rendue le 2 mai 1990.

Cette décision reprend les mêmes motifs que la décision G1/89 rendue le même jour.

G3/89 – Correction d’erreurs évidentes

La décision G3/89 a été rendue le 19 novembre 1992.

La R88 CBE73 (maintenant R139 CBE) prévoit que les erreurs concernant les revendications, la description ou les dessins sont possibles si la rectification s’impose à l’évidence.

De l’avis de la Grande Chambre, l’A123(2) CBE73 est tout à fait applicable à la correction : il convient donc de regarder à la date de dépôt ce que l’homme du métier pouvait objectivement déduire de la description (point 2 des motifs).

L’homme du métier doit donc être en mesure, à la date du dépôt (i.e. en dehors de toute publication ultérieure) et en se fondant sur les connaissances générales dans le domaine considéré :

  • de constater objectivement et sans équivoque l’erreur, et
  • de déduire simplement la correction à apporter.

Par conséquent, cette correction n’a pas d’effet rétroactif : celle-ci est une simple constatation (point 4 des motifs).

Tout moyen de preuve est possible (point 8 des motifs) du moment que ce moyen (écrit, témoignage, etc.) démontre les connaissances générales de l’homme du métier à la date du dépôt et non après (point 7 des motifs).

G1/90 – Révocation de brevet pour non-paiement de taxe d’impression

La décision G1/90 a été rendue le 5 mars 1991.

En l’espèce, le titulaire d’un brevet venant d’être maintenu sous forme modifiée (i.e. après opposition) n’avait pas payé la taxe d’impression prescrite par l’A102(3) b) CBE73 dans le délai trois mois prévu par la R58(5) CBE73.

La question qui se posait alors était de savoir si la révocation du brevet prévue à l’A102(4) CBE73 ou A102(5) CBE73 devait faire l’objet d’une décision (susceptible de recours, A106 CBE73) ou d’une simple constatation prévue par la R69 CBE73 (non susceptible de recours directement).

La Grande Chambre fait observer à titre liminaire que si la convention souhaitait indiquer que la sanction du non-respect du paiement de la taxe d’impression soit la perte de droit d’office, la rédaction de l’article aurait probablement été « est réputée révoquée » (point 4 des motifs) ou « est réputée retirée » (point 6 des motifs) comme partout ailleurs dans la convention .

Pour la Grande Chambre, la révocation d’un brevet pour non-respect du paiement de la taxe d’impression (A102(4) CBE73) ou production de traductions des revendications (A102(5) CBE73) doit revêtir la forme d’une décision. En effet :

  • une décision de révocation ne serait pas « dénuée de sens » (point 13 des motifs) contrairement aux affirmations de la chambre de recours) même si la perte de droit ne vise pas le droit matériel des brevets (i.e. nouveauté, activité inventive, etc.). Le recours peut être notamment utile afin de contester des problèmes de faits (ex. date effective du paiement).
  • la présentation d’une requête en restitutio in integrum n’est pas réellement source d’une quelconque insécurité juridique (point 14 des motifs) même si la décision n’est pas encore rendue. La décision rendue concernant un recours ultérieur (qui serait formé contre la décision) sera fusionnée avec la décision concernant la restitutio in intergrum.
  • il n’existe pas un besoin impérieux de faire survenir la perte des droits le plus tôt possible même pour la protection des tiers (point 15 des motifs).
  • la décision de révocation est plus simple juridiquement (une seule étape contrairement à la notification+décision sur requête, point 17 des motifs).

Les dispositions de la R82 CBE sont sensiblement identiques aux dispositions de l’A102(4) CBE73 et A102(5) CBE73. Ainsi cette décision reste applicable avec la CBE 2000.

G2/90 – Compétence de la chambre de recours juridique pour des décisions rendues par une division d’opposition

La décision G2/90 a été rendue le 4 août 1991.

En l’espèce, un titulaire d’un brevet avait oublié de payer les taxes de publication de son brevet après publication. L’agent des formalités lui avait donné deux mois supplémentaires et avait ensuite révoqué son brevet. Pour le titulaire qui a formé recours, l’agent des formalités n’avait aucun support légal pour le faire.

Cette affirmation était clairement purement juridique.

La question de droit qui se posait alors était de savoir si la chambre de recours juridique était compétente pour les recours dirigés contre des décisions confiées aux agents des formalités.

La compétence des chambres de recours est définie à l’A21 CBE73. Si la chambre de recours juridique peut intervenir à l’encontre de décision rendue par une division d’examen (A21(3) c) CBE73, point 3.2 des motifs), il n’est nullement prévu qu’elle puisse intervenir pour les décisions d’une division d’opposition (A21(4) CBE73, point 3.3 des motifs).

De l’avis de la Grande Chambre, le texte est clair et il ne faut pas y voir un oubli (point 3.3 et 3.4 des motifs) : seule la chambre de recours technique est compétente pour les décisions rendues par une division d’opposition.

L’A21 CBE étant identique, cette décision semble toujours s’appliquer avec la CBE 2000.

G1/91 – Unité d’invention et maintien sous forme modifiée après opposition

La décision G1/91 a été rendue le 9 décembre 1991.

Si après une opposition, le brevet est modifié de telle sorte que les revendications ne présentent plus de concept inventif commun (A82 CBE73), est-il possible de le maintenir sous forme modifiée ? En effet, l’A102(3) CBE73 prévoit que « le brevet et l’invention qui en fait l’objet satisfont aux conditions de la présente convention » . Ces conditions incluent-elles l’unité d’invention (point 2.1 des motifs) ?

De l’avis de la Grande Chambre, la raison d’être de l’exigence d’ « unité d’invention » est d’ordre administratif (point 4.1 des motifs) : l’utilité est pour le classement des brevets avec la nomenclature internationale, mais également d’éviter que le demandeur inclue abusivement plusieurs inventions dans une même demande et évite, de fait, d’importantes taxes de recherche et de dépôt.

D’ailleurs, la Grande Chambre note que la division, bien que prévue initialement par les travaux préparatoires de la convention jusqu’à la fin de l’opposition, avait été limitée aux simples demandes de brevet (point 6.2 des motifs), car elle était « inutile » du fait de l’absence d’opposition possible pour cause de non-unité d’invention.

En conséquence, la non-unité ne doit pas être prise en compte pour le maintien des brevets sous forme modifiée après opposition.

Cette décision reste valable sous la CBE 2000.

G2/91

La décision G2/91 a été rendue le 29 novembre 1991.

Remboursement des taxes de recours lors de l’existence de plusieurs requérants

En l’espèce, certaines chambres de recours conservaient la première taxe de recours perçue et remboursaient les taxes de recours suivantes, car les « autres parties à ladite procédure sont de droit partie à la procédure de recours » comme le précise l’A107 CBE73.

D’autres chambres conservaient toutes les taxes versées par chacun des requérants.

Qui avait raison ?

Pour la Grande Chambre, chacun des requérants doit payer… et cela est justifié par le prochain paragraphe.

Droit propre de poursuivre un recours lors du retrait d’un recours par un requérant

En effet, la Grande Chambre souligne qu’un requérant n’ayant pas payé n’a pas de droit à poursuivre seul le recours si le seul requérant ayant payé se retire.

En effet, seul ce dernier peut décider du maintien de son recours (point 6.1 des motifs).

Ainsi, tout remboursement de taxe de recours priverait les requérants de leurs droits.

Cette décision reste valable sous la CBE 2000, car l’A107 CBE n’a pas évolué.

G3/91 – Restitutio in integrum

La décision G3/91 a été rendue le 7 septembre 1992.

Comme vous le savez certainement par cœur, la CBE prévoit :

  • que, pour les demandes européennes :
    • il faut payer la taxe de recherche (A78(2) CBE73) sous un mois après le dépôt de la demande et
    • il faut payer les taxes de désignation (A79(2) CBE73) sous six mois à compter de la mention de la publication du RRE ;
    • il faut présenter une requête en examen (A94(2) CBE73) sous six mois à compter de la mention de la publication du RRE ;
  • que, pour les demandes euro-PCT :
    • il faut payer la taxe de recherche (A157(2) b) CBE73) sous 31 mois après le dépôt de la priorité la plus ancienne (R107(1) e) CBE73) ;
    • il faut payer la taxe nationale (couvrant les taxes de désignation, A158(2) CBE73) sous 31 mois après le dépôt de la priorité la plus ancienne (R107(1) d) CBE73) ;
    • il faut présenter une requête en examen (A150(2) CBE73) sous 31 mois après le dépôt de la priorité la plus ancienne (A39.1.b PCT).

Comme vous pouvez le voir, il existe certaines similitudes…

Mais les trois premiers délais sont exclus explicitement par l’A122(5) CBE73 tandis que les trois derniers délais n’y figurent pas… Est-ce un oubli ? Faut-il considérer que ceux-ci sont également exclus de la restitutio in integrum ?

De l’avis de la Grande Chambre, il faut considérer tous ces délais de la même manière : ainsi les délais de paiement de la taxe de recherche, de la taxe nationale et le délai de présentation de la requête en examen ne bénéficient pas de la restitutio in integrum (pour les demandes européennes, mais également pour les demandes Euro-PCT).

Cette décision n’est plus applicable avec la CBE 2000, car les différents délais mentionnés plus haut bénéficient maintenant de la restitutio in integrum.

G4/91 – Intervention

La décision G4/91 a été rendue le 3 novembre 1992.

En l’espèce, un tiers (à l’encontre duquel une action en contrefaçon) avait présenté une déclaration d’intervention conformément à l’A105(1) CBE73, alors que la division d’opposition avait décidé de maintenir le brevet sous forme modifié quelques semaines avant…

L’intervention est-elle valide sachant que le délai de recours courait toujours (i.e. sachant que la décision n’était pas passée en force de la chose jugée) ?

Pour la Grande Chambre, l’intervention n’est pas possible dans cette hypothèse, sauf à ce qu’une des parties à la procédure d’opposition forme de recours : en effet, sans ce recours, la procédure d’opposition n’est pas en instance.

Cette décision est toujours applicable avec la CBE 2000 puisque la R89 CBE reprend les mêmes dispositions.

G5/91 – Décisions susceptibles de recours

La décision G5/91 a été rendue le 5 mai 1992.

En l’espèce, le titulaire d’une demande avait allégué qu’un des membres de la division d’opposition n’était pas impartial, mais le directeur avait refusé de recomposer la chambre.

Indépendance des agents des organes de première instance de l’OEB

La Grande Chambre note que (point 2 des motifs) l’A24(1) CBE73 prévoit une impartialité pour les membres des chambres de recours et de la Grande Chambre, mais pas explicitement pour les agents des organes de premières instances comme :

  • la division d’examen,
  • la division d’opposition,
  • etc.

Pour autant (point 3 des motifs), cette obligation est, en vérité, un principe général et doit s’appliquer à tous.

Décisions susceptibles de recours

Le titulaire peut-il former un recours contre le refus du directeur de recomposer la chambre pour l’opposition ?

La Grande Chambre indique (point 5 des motifs) qu’il n’existe aucune base légale pour un tel recours.

Comme le précise l’A106(3) CBE73, il n’est pas possible de faire un recours contre une décision qui ne met pas fin à une procédure (comme la présente décision) sauf si ladite décision prévoie un recours indépendant.

Bien entendu, cette question pourra faire l’objet d’un recours avec la décision finale (point 6 des motifs).

Cette décision reste valable avec la CBE 2000, l’A106 CBE étant restée inchangée sur ce point.

G6/91 – Réduction de taxes

La décision G6/91 a été rendue le 6 mars 1992.

L’A14(4) CBE73 et A14(4) CBE73 dispose que les personnes domiciliées sur le territoire d’un pays membre peuvent déposer des pièces dans leur langue (autre que français, anglais, allemand) et bénéficier ainsi de réduction de taxes (R6(3) CBE73).

Remise de la traduction de manière simultanée

En l’espèce, une personne avait formé un recours contre une décision en fournissant simultanément un écrit rédigé dans sa langue ainsi qu’une traduction.

A titre liminaire, la Grande Chambre considère qu’il n’y a pas de contre-indication à déposer une traduction des pièces déposées en même temps que ces pièces (point 9 des motifs). Pour autant, il faut faire attention, car ces traductions ne doivent pas être prises pour les originales et par exemple : à titre d’illustration, les traductions ne peuvent pas être transmises AVANT les originaux au risque d’être considérées comme étant justement ces derniers (point 12 des motifs).

Pluralité de documents et traduction limitée à seulement certains documents

Que ce passe-t-il si le titulaire dépose plusieurs documents pour effectuer un acte de procédure, seulement certains d’entre eux étant dans sa langue ?

A priori, il n’y a pas lieu de considérer que tous les documents doivent être produits dans la langue du déposant afin de bénéficier de la réduction (point 15 des motifs). En effet, lorsque certains documents peuvent être remis après le paiement de la taxe, comment fait-on pour connaître le montant de la taxe à payer (on ne parle pas de remboursement de taxe, mais bien de réduction, point 16 des motifs) ?

Pour la Grande Chambre, il suffit de déposer dans sa langue le document essentiel du premier acte de procédure pour bénéficier de la réduction de taxe (point 21) :

  • la requête en examen pour la taxe d’examen (point 19 des motifs),
  • l’acte de recours pour la taxe de recours (et non le mémoire, point 24 des motifs),
  • etc.

Cette décision est, a priori, toujours valable avec la CBE 2000, car les A14 CBE et R6 CBE n’ont que peu évolué sur ce point.

G7/91 – Retrait du recours

La décision G7/91 a été rendue le 5 novembre 1992.

Elle renvoie textuellement à la décision suivante, la décision G8/91.

G8/91 – Retrait du recours

La décision G8/91 a été rendue le 5 novembre 1992.

En l’espèce, un opposant avait formé un recours sans que le titulaire le fasse, puis l’avait retiré… la procédure de recours peut-elle continuer d’office (un peu comme pour l’opposition R60(2) CBE73, point 6 des motifs) ?

Même si la non-continuation d’office peut laisser « survivre » des décisions de première instance entachées d’erreurs, la Grande Chambre de recours ne pense pas qu’il soit utile de permettre aux chambres de recours de continuer d’office un recours formé.

En effet :

  • Il existe une procédure d’opposition ouverte à tous si un tiers pense qu’il y a une erreur dans une décision (point 10.1 des motifs)
  • A priori, il n’existe pas tant que cela d’erreurs en première instance (point 10.2 des motifs) ;
  • Bien que l’office s’astreigne à délivrer des titres valables et non entachés de vices, il est nécessaire de clôturer à un moment la procédure pour la bonne gestion des moyens de l’office (point 10.3 des motifs) ;
  • Des procédures nationales pour annuler un brevet restent ouvertes (point 11.1 des motifs) ;

Cette décision reste valable avec la CBE 2000, car les principes du recours restent identiques.

G9/91 – Compétences pour analyser la validité des revendications

La décision G9/91 a été rendue le 31 mars 1993.

Mesure de la mise en cause

Les divisions d’opposition ou les chambres de recours peuvent-elles analyser la validité de revendications non attaquées par un opposant ou un requérant ? Sont-elles tenues par la déclaration de l’opposant de la R55 c) CBE73 (maintenant R76(2) c) CBE) ?

Pour la Grande Chambre, l’obligation du déposant de déclarer dans quelle mesure il souhaite mettre en cause le brevet (R55 c) CBE73) serait dénuée de sens si cette mesure pouvait être ultérieurement élargie (point 10 des motifs).

En conséquence, la division d’opposition ou la chambre de recours n’a aucun droit pour analyser des revendications non attaquées (point 11 des motifs).

En revanche, il est tout à fait possible d’analyser des revendications dépendantes non attaquées (point 11 des motifs) :

  • si la revendication indépendante « mère » a été attaquée ;
  • si leur validité est, prima facie, douteuse.

Motifs de la mise en cause

Le raisonnement est-il le même pour les motifs de mises en cause ? Les divisions d’opposition ou les chambres de recours sont-elles tenues par la déclaration de l’opposant ?

Pour la Grande Chambre, l’A114 CBE73 permet à la division d’opposition d’examiner d’office certains motifs non soulevés, mais cela doit rester exceptionnel, notamment si prima facie ces motifs s’opposent, en totalité ou en partie, au maintien du brevet (point 16 des motifs).

Pour la procédure devant les chambres de recours, il convient d’appliquer le principe de l’A114 CBE73 de manière beaucoup plus restrictive, car c’est une procédure judiciaire non inquisitoire (point 18 des motifs).

Ainsi, un argument non présenté au stade de l’opposition par l’opposant ne peut pas être présenté au stade du recours (sauf si, bien entendu, il est accepté par le titulaire, point 18 des motifs).

G10/91 – Compétences pour analyser la validité des revendications

La décision G10/91 a été rendue le 31 mars 1993.

Cette décision reprend les motifs des motifs G9/91.

G11/91 – Correction d’erreurs évidentes

La décision G11/91 a été rendue le 19 novembre 1992.

Cette décision a repris la substance des motifs G3/89 rendus le même jour.

G12/91 – Décision définitive

La décision G12/92 a été rendue le 17 décembre 1993.

En l’espèce, les faits étaient chronologiquement les suivants :

  • une opposition avait été formée contre un brevet ;
  • la chambre d’opposition décide de rejeter l’opposition et les trois membres de la chambre signent le formulaire prévu à cet effet ;
  • le titulaire propose de combiner les revendications 1 et 2 ;
  • le formulaire est remis par la chambre d’opposition au service interne de courrier sans tenir compte de cette dernière proposition.
  • le formulaire est remis à la poste par le service interne de courrier.
    finProcessusInterneDecision

La question qui se pose alors est de savoir à quel moment le processus interne de prise de décision est terminé.

La Grande Chambre rappelle que, pour une procédure orale (point 2 des motifs), le processus interne de prise de décision survient lors de son prononcé, c’est-à-dire à la fin de la procédure orale. En effet, l’instance qui l’a rendue ne peut plus revenir dessus (sauf en cas de recours préjudiciel) .

Selon la Grande Chambre et pour une procédure écrite, la fin du processus interne ne peut pas être :

  • la date de la remise des motifs à la poste par le service interne de courrier (point 6.2 des motifs), car elle ne reflète pas la date de la prise des motifs ;
  • la date de la signature par les trois membres (point 7.1 des motifs) ils peuvent encore revenir sur leur décision si un élément important est porté à leur connaissance ;
  • la date de la remise de la copie au net par la division à la section des formalités aux fins de la signification (point 8 des motifs), car elle ne peut pas être déterminée à partir du dossier.

Ainsi, il ne reste plus que « la date de la remise au service du courrier interne de l’OEB, par la section des formalités de la division » (point 9 des motifs). Cette date peut, de l’avis de la Grande Chambre, être très facilement connu à partir du dossier puisque, d’après le Président de l’OEB, elle est toujours antérieure de trois jours à la date tamponnée.

G1/92 – Accessibilité au public d’une composition ou d’une structure d’un produit divulgué

La décision G1/92 a été rendue le 18 décembre 1992.

La question qui se posait en l’espèce était de savoir si la composition d’un produit était accessible au public par le simple fait que ce produit était accessible au public (des analyses étant nécessaires pour trouver la composition) ?

Pour la Grande Chambre, si l’homme du métier parvient à découvrir la composition ou la structure interne du produit et à la reproduire sans difficulté excessive, alors le produit et sa composition ou sa structure interne sont compris dans l’état de la technique (voir point 1.4 des motifs).

La CBE ne prévoit aucunement que l’homme du métier soit incité à analyser la composition ou la structure interne d’un produit, et il n’est donc pas possible d’ajouter cette condition (point 2 des motifs) d’autant que cette condition serait subjective (point 2.1 des motifs).

Ainsi, toute divulgation d’un produit divulgue également sa composition ou sa structure (sous réserve que cette découverte par l’homme du métier ne présente pas de difficulté excessive).

Cette décision n’a pas de raison d’avoir été remise en cause par la CBE 2000.

G2/92 – Non-paiement de nouvelles taxes de recherche et revendications non cherchées

La décision G2/92 a été rendue le 6 juillet 1993.

Imaginons la situation suivante :

  • une demande est avec deux inventions présentes dans les revendications ;
  • une objection de non-unité est soulevée au stade de la recherche (A82 CBE73) et la division de la recherche demande le paiement d’une taxe de recherche supplémentaire (R46(1) CBE73) ;
  • le demandeur ne paye pas cette taxe de recherche ;

Dans cette hypothèse, le demandeur peut-il demander un examen sur la deuxième invention (qui n’a pas fait l’objet d’une recherche) ?

La Grande Chambre considère que (point 2 des motifs), si malgré l’invitation de la division de la recherche, le demandeur décide de ne pas acquitter de nouvelle taxe de recherche, il ne lui sera pas possible par la suite de faire de cette invention l’objet des revendications de sa demande.

Seule une divisionnaire sera possible.

G3/92 – Demandeur non habilité

La décision G3/92 a été rendue le 13 juin 1994.

L’A61(1) b) CBE73 prévoit notamment qu’en cas d’invention « volée » par un demandeur non habilité (ex. dépôt par un salarié alors que l’invention revenait à l’employeur), la personne s’étant faite volé l’invention peut déposer une nouvelle demande.

La question qui se posait était de savoir si l’A61(1) b) CBE73 s’appliquait même si la demande du demandeur non habilité n’était plus en instance (ex. absence de présentation de la requête en examen, oubli d’une taxe, etc.). En effet, la sécurité des tiers ne serait pas respectée dans cette hypothèse, pensant légitimement que l’invention objet des brevets est libre.

Pour la Grande Chambre, si la procédure de l’A61 CBE73 n’était plus applicable lorsque la première demande n’est plus en instance, cela reviendrait à accepter qu’un tribunal reconnaisse le droit au brevet à une personne, mais que l’OEB refuse un tel droit pour des raisons de procédures internes (point 5 des motifs).

Dès lors, il n’y a pas lieu de refuser, à une personne qui s’est vu reconnaitre un droit sur une invention par une instance nationale, le dépôt d’une demande selon l’A61(1) b) CBE73 (point 5.2 des motifs).

G4/92 – Fondement des décisions et nouveaux arguments lors de procédures orales

La décision G4/92 a été rendue le 29 octobre 1993.

Lors d’une procédure inter partes, si une partie qui ne se présente pas à la procédure orale, renonce-t-elle à son droit d’être entendue ? Peut-on alors citer de nouveaux documents ou de nouveaux arguments à l’encontre de sa demande ou de son brevet ?

En réalité, cette question est bien plus large, car (point 3 des motifs) elle touche au principe du contradictoire lors du rendu des motifs. En effet, l’A113(1) CBE73 dispose « les décisions [… ] ne peuvent être fondées que sur des motifs au sujet desquels les parties ont pu prendre position » .

Ainsi, afin de respecter le contradictoire, une décision ne peut pas se fonder sur :

  • des faits invoqués pour la première fois au cours de cette procédure orale ;
  • des moyens de preuve nouveaux (qui n’ont pas été même annoncé, point 9 des motifs).

Pour autant, une décision peut se fonder sur :

  • de moyens de preuves annoncés antérieurement à la procédure orale (et qui confirment les allégations d’une partie), mais produits que durant cette procédure orale ;
  • de nouveaux arguments (point 10 des motifs) dans la mesure où ils ne modifient pas les motifs sur lesquels se fonde la décision (car c’est seulement un raisonnement nouveau invoqué au soutien des moyens de droit et de fait déjà présentés).

Il n’y a pas de raison que la CBE 2000 ait changé cette décision.

G5/92 – Restitutio in integrum

La décision G5/92 a été rendue le 27 septembre 1993.

Dans cette décision, les questions posées sont sensiblement les mêmes que celles posées pour G3/91 donc on ne détaillera pas les motifs de la décision (ils sont donc identiques 🙂 ).

G6/92 – Restitutio in integrum

La décision G6/92 a été rendue le 27 septembre 1993.

Dans cette décision, les questions posées sont sensiblement les mêmes que celles posées pour G3/91 donc on ne détaillera pas les motifs de la décision (ils sont donc identiques 🙂 ).

G9/92 – Partie non requérante et reformatio in pejus

La décision G9/92 a été rendue le 14 juillet 1994.

Dans l’hypothèse où une personne forme un recours, une autre partie à la procédure (un opposant non requérant, le titulaire non requérant, la chambre de recours, etc.) peut-elle demander à modifier, au détriment du requérant, la décision attaquée ?

Selon la Grande Chambre, la chambre de recours doit se fonder sa décision ultra petita (i.e. sans aller au-delà de ce qui est demandé par le recours).

Ainsi, si le titulaire est l’unique requérant, l’opposant ou la chambre de recours ne pourront pas demander le rejet d’un jeu de revendication accordé par la division d’opposition (point 14 des motifs).

Si l’opposant est l’unique requérant, le titulaire du brevet ne peut pas étendre la portée de ses revendications de manière incidente (point 16 des motifs).

G10/92 – Demande divisionnaire et demande mère sur le point d’être délivrée

La décision G10/92 a été rendue le 28 avril 1994.

Dans cette décision se posait la question de la date limite pour déposer une demande divisionnaire. En d’autres termes, jusqu’à quand une demande mère est en instance lorsque cette dernière est sur le point d’être délivrée

Il faut savoir que la R25(1) CBE73 a subi de nombreuses modifications pendant la vie de la CBE73. En l’espèce, la R25(1) se lisait comme suit lors de cette décision :

(1) Le demandeur peut déposer une demande divisionnaire relative à une demande de brevet européen initiale encore en instance jusqu’au moment où il donne, conformément à la règle 51, paragraphe 4, son accord sur le texte dans lequel il est envisagé de délivrer le brevet européen.

Pour la Grande Chambre, il n’existe donc pas de difficulté d’interprétation et si le demandeur a donné son accord avec le texte de la demande mère, il n’est plus possible de diviser.

Cette décision n’est plus d’actualité puisque la rédaction de la R25(1) CBE73 (puis de la R36(1) a) CBE, ajourd’hui supprimée) a été complètement changée.

G1/93 – Caractéristique restrictive, la tenaille « 123(2)-123(3) »

La décision G1/93 a été rendue le 2 février 1994.

Imaginons que durant l’examen, le titulaire rajoute une caractéristique limitative à une revendication. Cette caractéristique n’est pas, en réalité, supportée par la description.

Le titulaire peut-il supprimer cette caractéristique en opposition simplement ?

La Grande Chambre souligne que les A123(2) CBE73 et A123(3) CBE73 ne sont pas des dispositions interdépendantes (point 13 des motifs), principe qui voudrait alors dire que l’une ou l’autre disposition devant s’appliquer en fonction du cas de l’espèce. Ces dispositions sont bien indépendantes et elles doivent toutes les deux s’appliquer en cas de modification(s) d’un brevet.

Ainsi, si, du fait de la présence dans les revendications d’une caractéristique violant les dispositions de l’A123(2) CBE73, il est envisagé une modification, cette modification doit respecter l’A123(3) CBE73 :

  • la modification est refusée si elle étend la portée des revendications ;
  • la modification pouvant être acceptée si la modification consiste dans le remplacement de la caractéristique par une caractéristique « plus restrictive » et supportée.

Cette décision reste d’actualité avec la CBE2000, les A123(2) CBE et A123(3) CBE étant identique.

G2/93 – Dépôt de matière biologique et numéro de dépôt

La décision G2/93 a été rendue le 21 décembre 1994.

Dans certaine demande, il peut être fait référence à certaine matière biologique non accessible du public (R28(1) CBE73 ou R31(1) CBE) pourvu que soit communiqué une indication de l’autorité de dépôt et le numéro d’ordre de la matière biologique déposée dans un délai de 16 mois à compter de la priorité la plus ancienne.

La question qui se posait était de savoir si les dispositions de l’A91 CBE73 (i.e. délai supplémentaire pour corriger une irrégularité, notamment pour la production des documents de priorité R38(3) CBE73) pouvaient s’appliquer quand bien même cet article ne mentionnait pas explicitement ce cas.

Pour la Grande Chambre, il existe une différence fondamentale entre l’exigence de fourniture du « numéro d’ordre » (condition de fond pour la suffisance de description) et l’exigence de fourniture des documents de priorité (condition de forme). Ainsi aucune analogie n’est possible.

En conclusion, le délai fixé à la R28(2) a) CBE73 n’est pas prolongeable.

G3/93 – Opposabilité et validité de la priorité

La décision G3/93 a été rendue le 16 août 1994.

La question qui se posait était de savoir si un document publié pendant le délai de priorité constitue une antériorité opposable, au titre de l’A54(2) CBE73, à une demande de brevet européen lorsque la revendication de priorité (la demande comprend des éléments qui n’ont pas été divulgués dans le document de priorité).

Nous rappelons que l’A87(1) CBE73 définit le droit de priorité. Celui-ci est accordé, conformément à la convention de Paris, pour la même invention que celle présente dans le document de priorité.

L’A89 CBE73 dispose que, lorsqu’une demande revendique valablement une priorité, la date de priorité est considérée comme celle du dépôt de la demande de brevet européen pour l’application de l’A54(2) CBE73, A54(3) CBE73 (état de la technique opposable), et A60(2) CBE73 (le droit au brevet appartient au premier déposant).

Ainsi, si une priorité est non valable, toute divulgation intercalaire devient donc opposable (point 9 des motifs).

G4/93 – Partie non requérante et reformatio in pejus

La décision G4/93 (disponible qu’en anglais) a été rendue le 14 juillet 1994.

Cette décision est la « version » anglaise des motifs G9/92.

G5/93 – Restitutio in integrum

La décision G5/93 a été rendue le 18 janvier 1994.

Comme vous le savez, la décision G3/91 a souligné que les délais suivants ne bénéficient pas de la restitutio in integrum (demande Euro-PCT) :

  • paiement de la taxe de recherche (A157(2) b) CBE73) sous 31 mois après le dépôt de la priorité la plus ancienne (R107(1) e) CBE73) ;
  • paiement de la taxe nationale (couvrant les taxes de désignation, A158(2) CBE73) sous 31 mois après le dépôt de la priorité la plus ancienne (R107(1) d) CBE73) ;
  • présentation de la requête en examen (A150(2) CBE73) sous 31 mois après le dépôt de la priorité la plus ancienne (A39.1.b PCT).

La Grande Chambre confirme son analyse, mais note que l’OEB avait lui-même publié une information contraire dans l’ « Avis aux déposants PCT » (JO OEB 1991, 333). Dans cet avis, il indiquait qu' »en cas de perte d’un droit [en raison du non-paiement de la taxe nationale de base, des taxes de désignation, de la taxe de recherche et des taxes de revendication], le déposant peut, en application de l’article 122 CBE, être rétabli dans ce droit » (point 2.1 des motifs).

Ainsi, il serait inéquitable que l’A122 ne puisse pas être utilisé dans de tels cas au moins jusqu’à la date à laquelle la décision G3/91 a été rendue accessible au public (point 2.3 des motifs).

En conséquence, la Grande Chambre indique que la restitutio in integrum n’est bien pas possible pour les délais mentionnés ci-avant sauf si la requête en restitutio a été présentée avant que la décision G3/91 ait été rendue accessible au public.

G7/93 – Modifications tardives, après accord sur le texte de délivrance

La décision G7/93 a été rendue le 13 mai 1994.

Si un demandeur donne son accord en vertu de la R51(4) CBE73 (maintenant R71(3) CBE), peut-il, avant la décision finale de délivrance, demander une modification des revendications et retirer son accord sur le texte préalablement validé ?

Pour la Grande Chambre, l’A113(1) CBE73 ne donne aucun droit particulier au demandeur concernant son accord (aucun droit de modification notamment), mais interdit plutôt à l’OEB de prendre une décision sur un texte de demande autre que « le texte proposé ou accepté par le demandeur ou par le titulaire du brevet » (point 2.1 des motifs).

En l’espèce, la Grande Chambre souligne que la R86(3) CBE73 (maintenant R137(3) CBE) donne un pouvoir discrétionnaire à l’OEB pour accepter les modifications proposées par le titulaire durant l’examen (point 2.3 des motifs). Pour autant, ce pouvoir discrétionnaire doit être exercé dans un objectif constructif. Il faut ainsi tenir compte à la fois (point 2.5 des motifs) :

  • de l’intérêt du demandeur à obtenir un brevet juridiquement valable dans tous les États désignés, et
  • de l’intérêt de l’OEB à conclure la procédure d’examen en décidant la délivrance du brevet.

Ainsi, il est possible pour l’OEB de passer outre le « retrait » de l’accord du demandeur si l’OEB a invité le demandeur à payer les taxes de délivrance et d’impression et à déposer la traduction des revendications, et ne pas prendre en compte les modifications proposées. Pour autant, elle peut également prendre en compte ces dernières, si elles les trouvent pertinentes.

Cette décision a probablement été remise en cause par la nouvelle rédaction de la R71(3) CBE : en effet, les modalités de l’accord du demandeur sur le texte a bien changé. Pour autant, le retrait de cet accord semble rester identique : l’OEB conserverait une totale discrétion sur la prise en compte de nouvelles revendications une fois cet accord donné.

G8/93 – Retrait du recours par le requérant et clôture de la procédure de recours

La décision G8/93 a été rendue le 13 juin 1994.

Que se passe-t-il si un opposant, seul requérant, retire son recours ? La procédure d’opposition est-elle clôturée d’office ou la division d’opposition peut-elle poursuivre cette opposition en vertu de l’A114(1) CBE73, notamment si elle considère que de sérieux motifs justifient la révocation ou la limitation du brevet ?

La Grande Chambre souligne tout d’abord qu’il n’est pas possible de « retirer son opposition » au stade du recours : seul le retrait du recours est possible (la question posée par la chambre de recours mélangeait ces concepts, point 2 des motifs).

Enfin, la Grande Chambre confirme sa décision G8/91 et indique qu’il n’est pas permis aux chambres de recours de continuer d’office un recours si un retrait du recours est effectué par le seul requérant, et ce quelque soit l’avis du titulaire du brevet.

G9/93 – Opposition par le titulaire

La décision G9/93 a été rendue le 6 juillet 1994.

Comme dans la décision G1/84, se posait la question de la légalité de l’opposition du titulaire contre son propre brevet. Cette question se posait, car la Grande Chambre avait considéré dans la décision G9/91 que son analyse sur le fondement de la procédure d’opposition était fausse dans la décision G1/84 (voir point 2 des motifs) :

on peut s’interroger sur la justesse de la déclaration, du moins en tant que généralisation, faite par la Grande Chambre de recours dans l’affaire G1/84 (JO OEB 1985, 299, point 4 de l’exposé des motifs : « … l’on aurait tort de les considérer (les procédures d’opposition prévues par la CBE) comme des procédures essentiellement contentieuses qui opposent des parties en conflit [… ] » . [… ]

En tout état de cause, la Grande Chambre de recours, dans sa composition actuelle, estime que la procédure d’opposition après délivrance prévue par la CBE doit en principe être considérée comme une procédure contentieuse entre des parties défendant normalement des intérêts opposés, et auxquelles il faut accorder un traitement équitable.

Ainsi, les fondements des motifs G1/84, qui autorisaient une opposition contre soi-même, restaient-ils applicables ?

La réponse est non ! (point 5 des motifs)

Pour la Grande Chambre, il convient d’interpréter le « toute personne » de l’A99(1) CBE73 à la lumière de la finalité de la procédure (point 3 des motifs). En particulier, l’argument de l’effort que doit fournir l’OEB pour « ne délivrer et ne maintenir que des brevets valables » ne semble pas suffisant (point 4.2 des motifs).

L’absence de limitation (à l’époque), si cela est un problème, doit plutôt être résolu par le législateur et non pas par des artifices juridiques d’interprétation (point 4.1 des motifs).

G10/93 – Portée de l’examen et procédure de recours ex-parte contre une décision rejetant une demande

La décision G10/93 a été rendue le 30 novembre 1994.

Lors d’un recours à l’encontre d’une décision de rejet en examen, la chambre de recours réeffectue-t-elle une analyse complète de la brevetabilité ou se limite-t-elle aux motifs de rejet de l’instance de première instance (i.e. sans réanalyser les conditions de validité que la division d’examen a considérées comme remplies).

La Grande Chambre note tout d’abord que, pour une procédure inter-parte, la prise en considération limitée de nouveaux moyens était justifiée par la procédure contentieuse (point 2 des motifs) et par le caractère judiciaire de ce recours.

Au contraire, la procédure ex-parte est une procédure administrative et donc plus inquisitoire (point 3 des motifs). Ainsi, les chambres de recours peuvent prendre en compte de nouveaux motifs, de nouvelles preuves ou de nouveaux faits.

Pour autant, il n’est pas nécessaire de réaliser un examen complet (point 4 des motifs), car cela relève de la compétence des divisions d’examen. Si la chambre de recours pense qu’une condition de brevetabilité n’est pas remplie, elle peut :

  • l’introduire dans la procédure de recours ;
  • demander à la division d’examen d’étudier la question.

Ce principe ne viole pas la non reformatio in pejus (point 6 des motifs), car aucune décision ne peut être pire que le rejet de la demande.

G1/94 – Intervention dans une procédure de recours

La décision G1/94 a été rendue le 11 mai 1994.

L’A105 CBE73 dispose qu’un contrefacteur présumé peut intervenir à une opposition. Mais peut-il le faire lors d’une procédure de recours sur opposition (qui a une nature juridique différente de la procédure d’opposition : judiciaire et non administrative G8/91 !) ? L’intervenant peut-il soulever tout motif d’opposition ou est-il tenu par ceux déjà présentés ?

Dans une précédente décision (G4/91), la Grande Chambre de recours avait simplement indiqué que si aucune des parties à la procédure d’opposition ne formait recours sur opposition, toute intervention demeurait sans effet (point 1 des motifs).

En se référant aux travaux préparatoires de la CBE (point 8 des motifs), la Grande Chambre souligne que les discussions entre les États contractants souhaitaient bien inclure le recours dans le périmètre de l’A105 CBE73 et avaient même adopté la R57(4) afin de modérer quelques effets négatifs par la R57(4) CBE73.

La Grande Chambre confirme ainsi que l’expression « procédure d’opposition » de l’A105(1) CBE73 doit être comprise comme couvrant également la procédure de recours sur opposition (point 10 des motifs).

De plus, la Grande Chambre souligne que l’intervenant dans une telle procédure de recours peut présenter tous les motifs, arguments ou preuves qu’il souhaite, même si ceux-ci n’ont précédemment pas été invoqués (point 13 des motifs) : dans cette hypothèse, un renvoi en première instance peut être possible. En effet, interdire à l’intervenant de recourir à ces moyens de défense (sachant qu’il est accusé de contrefaçon) serait contraire à la finalité de l’intervention.

G2/94 – Prise de parole devant la chambre de recours et procédure ex-parte

La décision G2/94 a été rendue le 19 février 1996.

En l’espèce, un mandataire agréé avait demandé à une chambre de recours l’autorisation qu’un ancien membre de la chambre (en l’espèce un ancien président ayant cessé ses fonctions deux ans auparavant).

Quelles sont les règles régissant la prise de parole par un non-mandataire ? En particulier si celui-ci est un ancien président ?

En premier lieu, la Grande Chambre renvoie à la décision G4/95 (qui a été rendue avant) pour ce qui concerne la prise de parole par un assistant (point 1 des motifs). Bien que la décision G4/95 s’applique à une procédure d’opposition, les principes restent le même pour une procédure ex-parte : la chambre dispose d’un pouvoir d’appréciation complet pour l’autoriser si elle le souhaite.

Pour autant, pour autoriser une intervention d’un intervenant, il convient de prévenir suffisamment tôt la chambre en indiquant le nom, la qualité, et le sujet abordé par l’intervenant (point 2 des motifs).

Si l’intervention est autorisée, l’assistant effectue alors son exposé oral sous la responsabilité et le contrôle permanents du mandataire agréé (point 3 des motifs).

Concernant la prise de parole par un ancien membre de la chambre, il n’existe aucune règle les interdisant formellement : il convient donc de faire attention pour éviter, tout du moins, une « apparence de favoritisme » (point 4 des motifs) concernant les simples prises de paroles. Ainsi, les chambres de recours disposent (à défaut d’autres règles) d’un pouvoir d’appréciation afin de déterminer à partir de quand un ancien membre peut s’exprimer devant la chambre (point 7) : a priori 3 ans devraient être un bon compromis (point 8).

G1/95 – Nombre de motifs d’opposition de A100 a) CBE73

La décision G1/95 a été rendue le 19 juillet 1996.

Dans cette affaire, la chambre de recours avait rejeté une demande en considérant que l’objet revendiqué manquait d’application industrielle et n’était pas une invention (A52(1) CBE73 et A52(2) CBE73). Néanmoins, l’opposition formée ne mentionnait que la nouveauté (A54 CBE73) et l’activité industrielle (A56 CBE73).

En réalité, tous les articles précédents sont mentionnés sous une seule puce de l’A100 CBE73 (listant les motifs d’opposition possibles) :

a) l’objet du brevet européen n’est pas brevetable aux termes des articles 52 à 57 ;

La question qui se pose donc : est-ce que l’A100 a) CBE73 est un seul motif ou plusieurs motifs (point 2 des motifs) ?

Pour la Grande Chambre, la puce a) de A100 CBE73 ne peut contenir qu’un seul motif, car les « fondements juridiques » de la nouveauté, de l’activité inventive, etc. sont différents (point 4 des motifs).

En conséquence, la chambre de recours ne peut pas introduire un nouveau motif (comme l’a indiqué la décision G9/91) non soulevé par l’opposant, quand bien même ce motif serait l’application industrielle et que l’opposant avait invoqué la nouveauté ou l’activité inventive.

G2/95 – Remplacement de l’ensemble de la demande pour cause d’erreur

La décision G2/95 a été rendue le 14 mai 1996.

Imaginons qu’un déposant dépose une première demande en France, puis dépose une deuxième demande EP sous priorité de la demande française. Le dépôt de cette deuxième demande est complètement raté et la description déposée ne correspond en rien à l’invention de la première demande (ne rigolez pas… ça arrive).

Est-il possible, dans le cadre d’une correction d’erreur au titre de la R88 CBE73, de remplacer l’ensemble des pièces d’une demande par d’autres pièces (i.e. celles que le demandeur aurait voulues réellement déposer) ?

La Grande Chambre rappelle que les dispositions de l’A123(2) CBE73 priment sur les dispositions de la R88 CBE73 (point 2 des motifs). Ainsi, en raison de l’interdiction d’étendre l’objet d’une demande, il n’est possible de recourir à des documents autres que la description, les revendications et les dessins ou des documents qui confirment les connaissances générales de l’homme du métier à la date du dépôt qui est fixée par la A80 CBE73 (G3/89) : il n’est donc pas permis pour une rectification de faire appel à d’autres documents, même s’ils ont été produits lors du dépôt de la demande de brevet européen, qu’il s’agisse en particulier de documents de priorité, de l’abrégé, etc. (G3/89).

Donc non ! ce n’est pas possible…

G3/95 – Saisine irrecevable

La décision G3/95 a été rendue 27 novembre 1995.

Elle n’est pas très intéressante, car la question soulevée par le président a été jugée irrecevable, les décisions citées n’étant pas contradictoires.

G4/95 – Prise de parole en procédure orale par une personne autre que le mandataire

La décision G4/95 a été rendue le 19 février 1996.

La question qui se posait était de savoir si un tiers (autre que le mandataire) pouvait prendre la parole pendant une procédure orale d’opposition.

La Grande Chambre n’y voit rien à redire, mais encadre cette pratique, quel que soit la personne prenant la parole : l’instance concernée doit donner son accord, accord donné discrétionnairement.

Les conditions principales de cet accord sont :

  • une autorisation doit être demandée et elle doit contenir les nom et qualités de la personne souhaitant prendre la parole et préciser l’objet de l’exposé oral ;
  • cette autorisation doit arriver à l’OEB suffisamment tôt avant la procédure orale : les parties adverses doivent pouvoir préparer leur réponse à cet exposé. Sinon l’autorisation doit être refusée (sf. si accord des adversaires) (point 10 des motifs) ;
  • la prise de parole se fait sous la responsabilité et le contrôle permanents du mandataire agréé (point 8 des motifs).

Si cette décision s’applique surtout en opposition ou en recours sur opposition (procédure inter partes), il n’y a pas de raison qu’elle ne s’applique pas en ex parte, comme l’a souligné la décision G2/94 (rendue après).

G6/95 – Application de la R71 bis aux chambres de recours

La décision G6/95 a été rendue le 24 juillet 1996.

En l’espèce, le conseil d’administration de l’OEB avait ajouté une règle R71bis CBE73 en vertu des pouvoirs conférés par l’A33(1) b) CBE73. La R71bis(1) CBE73 prévoit notamment une notification, envoyée en même temps que la citation à procédure orale, détaillant les questions nécessaires d’examiner.

Or, une chambre de recours s’étonne de ce nouvel article (non pas vraiment sur le fond, mais sur la forme) : le conseil d’administration modifie bien le règlement sur la base de l’A33(1) b) CBE73 (pouvoir général), mais semble s’opposer aux règles de procédure des chambres de recours (ou RPCR, qu’il a lui-même arrêté selon l’A23(4) CBE73, pouvoir spécial), la R11(2) du RPCR ne prévoyant pas de manière obligatoire une telle notification (seulement la possibilité).

Bref, la chambre de recours est un peu perdue… Que faut-il appliquer ?

La chambre de recours souligne que le RPCR n’a pas à « toujours se conformer à la version en vigueur du règlement d’exécution » (point 2 des motifs). En effet, le Conseil d’administration ne peut pas modifier le règlement d’exécution (i.e. introduction de la R71bis(1) CBE73) de telle sorte que l’effet d’une règle modifiée soit en contradiction avec la CBE elle-même (i.e. la validation du RPCR, les articles étant supérieurs aux règles, A164(2) CBE73, point 4 des motifs).

Ainsi, la R71bis(1) CBE73 ne peut pas s’appliquer aux chambres de recours, sinon nous serions en plein dans la contradiction mentionnée ci-dessous (point 5 des motifs).

G7/95 – Attaque de la nouveauté en opposition alors que le motif soulevé est l’activité inventive

La décision G7/95 a été rendue le 19 juillet 1996.

En réalité, cette décision a été rendue le même jour que la décision G1/95 (sur le nombre de motifs de l’A100 a) CBE73) et partage sensiblement les mêmes motifs.

Ici, la Grande Chambre indique que, néanmoins, si l’activité inventive et la nouveauté sont bien deux motifs distincts, il est possible d’attaquer la nouveauté de l’invention sans l’avoir soulevé explicitement (en ayant seulement soulevé l’activité inventive) pourvu que cette nouveauté soit analysée par rapport au document de l’état de la technique le plus proche.

G8/95 – Rectification d’une décision de délivrance et compétence des chambres de recours juridiques / techniques

La décision G8/95 a été rendue le 16 avril 1996.

Si une « requête en modification des motifs de délivrance » (R89 CBE73) est présentée par le titulaire et que la chambre d’Examen a refusé d’y faire droit.

La question qui se posait était de savoir quelle chambre de recours était compétente (technique ou juridique). Cela dépend-il du sujet du recours ?

La Grande Chambre rappelle que la compétence des chambres de recours contre les décisions de la division d’examen est définie par l’A21(3) CBE73 (point 2 des motifs). La lettre a) indique que la chambre technique est compétente lorsque la décision attaquée est « relative [… ] à la délivrance d’un brevet européen » .

La question est donc celle de savoir si la décision rendue sur une requête en rectification des motifs de délivrance « est relative à » la décision de délivrance.

La Grande Chambre fait remarquer (point 3 des motifs) que les recours contre les décisions de délivrance visent à obtenir ce qui a été refusé (A113(2) CBE73), et visent donc à faire corriger une erreur sur le fond : c’est d’ailleurs pour cela qu’on peut faire un recours (A107 CBE73). La « requête en modification des motifs de délivrance » (R89 CBE73) vise également à modifier une décision, mais cela vise une erreur sur la forme (point 3.2 des motifs).

Même si elle n’adresse que la forme, il est clair qu’une requête en rectification des motifs de délivrance est bien relative à la délivrance du brevet (point 3.3 des motifs) : en conséquence, la chambre de recours technique est bien compétente (point 6 des motifs) !

G1/97

La décision G1/97 a été rendue le 10 décembre 1999.

Recours sur un recours / requête en vue d’une révision

Suite à une décision de rejet par une chambre de recours, un requérant avait fait un recours sur cette décision en indiquant que la décision de révocation avait été prise par une chambre exerçant les compétences de la division d’opposition conformément à l’A111(1) CBE73 et que, dès lors, sa décision était susceptible de recours.

Cependant, la Grande Chambre n’est pas d’accord : les décisions des chambres de recours acquièrent force de chose jugée dès qu’elles sont rendues, un recours selon l’A106 CBE73 contre ces décisions est donc exclu (point 2.a des motifs). L’A111(1) CBE73 n’oblige absolument pas les chambres de recours de renvoyer les affaires en première instance afin que les parties gardent un droit de recours : les chambres de recours gardent un pouvoir discrétionnaire pour reformer les décisions.

Un tel recours doit être déclaré irrecevable par la chambre de recours qui a pris la décision dont la révision est demandée : la décision d’irrecevabilité peut être rendue immédiatement sans formalité processuelle.

A122 et A121 permettant de corriger une violation d’un principe fondamental de procédure

En outre, le requérant avait déposé des requêtes en restitutio in integrum (A122 CBE73) et en poursuite de la procédure (A121 CBE73). En effet, il soutenait qu’il n’avait pas eu l’occasion de déposer des jeux de revendications supplémentaires malgré toute l’attention qu’il avait porté à l’affaire, car la chambre de recours n’avait jamais indiqué son intention de rejeter.

Ce raisonnement n’est pas possible pour la Grande Chambre, car ces deux articles nécessitent le manquement d’un délai, ce qui n’est pas le cas dans la présente situation (point 2.b des motifs).

R89 permettant de corriger une violation d’un principe fondamental de procédure

Le requérant avait également soutenu qu’une révision des motifs était possible sur la base de la R89 CBE73 (mêmes arguments que précédemment).

La Grande Chambre indique que la R89 CBE73 permet des erreurs formelles dans les décisions, mais pas des erreurs de fond (point 2.c des motifs).

Instance de cassation

CJCE

Le requérant soutenait également que les travaux préparatoires de la convention faisaient apparaitre que la CJCE devait être saisie en cas de violation fondamentale de la procédure.

La Grande Chambre de recours ne partage pas cette opinion. Au contraire, la saisine de la CJCE a été abandonnée par le législateur au profit de la Grande Chambre de recours qui devait suffire comme instance régulatrice (point 2.e des motifs).

Création d’une voie spécifique

Par ailleurs, comme la grande majorité des pays de la convention prévoient une cassation possible en cas de violation fondamentale de la procédure, le requérant soutenait que l’A125 CBE73 donne la base légale à une telle cassation dans le système de la CBE :

En l’absence d’une disposition de procédure dans la présente convention, l’Office européen des brevets prend en considération les principes généralement admis en la matière dans les États contractants.

La Grande Chambre ne pense pas que cet article soit suffisant : en effet, il fait référence à « des principes » et ne permettrait pas la création complète d’une voie spécifique de cassation (point 3.a à 3.d des motifs).

Contradiction avec l’ADPIC

Le requérant soutenait que, si aucun moyen de cassation n’était possible, l’A32 ADPIC (qui est supérieure à la convention) est violé :

Pour toute décision concernant la révocation ou la déchéance d’un brevet, une possibilité de révision judiciaire sera offerte.

La Grande Chambre de recours n’est pas de cet avis, car l’A62(5) ADPIC (règle spécifique aux décisions administratives contrairement à l’A32 ADPIC qui est applicable à toutes les décisions, voir point 5.d des motifs) est en réalité l’article applicable au cas d’espèce :

Les décisions administratives finales dans l’une quelconque des procédures mentionnées au paragraphe 4 pourront faire l’objet d’une révision par une autorité judiciaire ou quasi judiciaire. Toutefois, il n’y aura aucune obligation de prévoir une possibilité de révision des décisions en cas d’opposition formée en vain ou de révocation administrative, à condition que les motifs de ces procédures puissent faire l’objet de procédures d’invalidation.

En effet, une décision administrative (ici la décision de la chambre d’opposition), qui maintient un brevet, peut faire l’objet d’une révision (ici un recours) par une autorité judiciaire ou quasi judiciaire (ici une chambre de recours). Rien n’indique que l’A32 ADPIC doivent s’appliquer à la décision de révision (sinon, les recours s’imbriqueraient sans fin… ).

G2/97 – Principe de bonne foi et défaut de paiement de la taxe de recours

La décision G2/97 a été rendue le 12 novembre 1998.

Si le requérant ne paye pas de taxe de recours, le principe de bonne foi impose-t-il que l’OEB prévienne le « requérant potentiel » de son oubli ?

Selon la Grande Chambre (point 4.1 des motifs), la « protection de la confiance légitime des utilisateurs du système du brevet européen » exige que l’OEB signifie au demandeur toute perte de droit (éventuellement potentielle) si celui-ci peut s’attendre à recevoir un tel avis.

Par exemple, si l’OEB reçoit un courrier mentionnant « vous trouverez ci-joint un chèque » et qu’aucun chèque n’est présent, l’OEB doit notifier cette irrégularité potentielle. De même, si la requête du demandeur n’est pas claire, l’OEB doit demander au demandeur de clarifier sa requête.

Mais ce principe ne va pas au-delà : l’OEB n’a pas d’obligation de prévenir le demandeur si rien ne permet de douter.

G3/97 – Opposition et « homme de paille »

La décision G3/97 a été rendue le 21 janvier 1999.

La question qui se posait était de savoir si l’utilisation de « prête-nom » (couramment appelé « homme de paille ») était une pratique acceptable en opposition afin de cacher le véritable opposant ?

La Grande Chambre souligne que la notion de « véritable opposant » est juridiquement absurde, car tout tiers peut former une opposition et que la notion d’opposant est une notion procédurale (point 2.1 des motifs). Ainsi, la Grande Chambre a décidé qu’une opposition n’est pas irrecevable du seul fait que l’opposant est un homme de paille.

Cependant, il ne fait pas que cette pratique constitue un contournement de la loi :

  • l’opposant agit pour le compte du titulaire du brevet (contournement du principe posé par G9/93, point 4.1 des motifs) ;
  • l’opposant agit pour le compte d’un client dans le cadre d’activités qui, dans l’ensemble, sont caractéristiques de celles d’un mandataire agréé, sans posséder les qualifications requises par l’A134 CBE73 (point 4.2.1 des motifs).

Cela n’empêche pas les situations suivantes :

  • un mandataire agréé agit en son nom propre pour le compte d’un client (point 4.2.2 des motifs) ;
  • un opposant ayant son domicile ou son siège dans un État partie à la CBE agit pour le compte d’un tiers qui ne remplit pas cette condition (point 4.2.3 des motifs).

Lorsqu’il s’agit de déterminer s’il y a contournement abusif de la loi, il convient d’appliquer le principe de la libre appréciation des preuves : ces dernières doivent être apportées par celui qui invoque l’irrecevabilité, elles doivent être claires et sans équivoque.

G4/97 – Opposition et « homme de paille »

La décision G4/97 a été rendue le 21 janvier 1999.

Elle reprend les mêmes motifs et décisions que la décision G3/97.

G1/98

La décision G1/98 a été rendue le 20 décembre 1999.

Revendications englobant une variété végétale

En l’espèce, la chambre de recours ne savait pas s’il fallait qu’elle rejette une revendication de « plante transgénique » sachant que :

  • cette revendication englobait de fait certaines variétés végétales spécifiques (mais sans les revendiquer individuellement) ;
  • l’A53 b) CBE73 prohibe les revendications de « variétés végétales » .

Nous rappelons qu’une variété végétale est (point 3.1 des motifs) un ensemble végétal d’un taxon botanique du rang le plus bas connu qui peut être :

  • défini par l’expression des caractères résultant d’un certain génotype ou d’une certaine combinaison de génotypes,
  • distingué de tout autre ensemble végétal par l’expression d’au moins un desdits caractères et
  • considéré comme une entité eu égard à son aptitude à être reproduit conforme.

Pour la Grande Chambre (point 3.1 des motifs), la chambre de recours confond portée et objet (i.e. invention sous-jacente) de la revendication. Seules sont interdites les revendications dont l’objet est une variété végétale : l’interdiction de l’A53 b) CBE73 est une interdiction sur l’objet des revendications et non pas leur portée.

En effet, l’interdiction concernant la portée semble excessive, car si on utilisait un raisonnement similaire avec les dispositions de A53 a) CBE73, une photocopieuse pourrait être exclue de la brevetabilité (ex. photocopie de billets de banque, etc.).

Par ailleurs (point 3.4 des motifs), la Grande Chambre rappelle que cette interdiction a été créée afin d’éviter une double protection (par brevet et par le droit d’obtenteur végétal de la convention UPOV). Si cette interdiction est plutôt administrative, la convention UPOV de 1991 n’interdit plus la double protection. En tout état de cause, cet historique prône pour une interprétation stricte de A53 b) CBE73 afin d’éviter de réduire le champ de la brevetabilité de manière indue (point 3.10 des motifs).

Produit obtenu par un procédé d’obtention de variété végétale

La question se posait également était de savoir si une revendication d’obtention de variété végétale devait être exclue à cause de l’A64(2) CBE73. Cet article dispose que les produits issus d’un procédé sont également protégés par une telle revendication, ce qui reviendrait, indirectement, à protéger les variétés végétales pourtant exclues par A53 b) CBE73.

Pour la Grande Chambre (point 4 des motifs) il n’y a pas de problème, car la protection ainsi accordée aux produits n’est pas aussi large que celle accordée par une revendication de produit en tant que telle. En effet, le produit protégé est en réalité un « product by process » caractérisé par son mode de fabrication.

Ainsi, l’A64(2) CBE73 est inopérant pour analyser la brevetabilité d’une revendication.

G2/98 – Priorité et conditions pour être en présence de la « même invention »

La décision G2/98 a été rendue le 31 mai 2001.

Le président a demandé quelques précisions sur la notion de « même invention » .

Tout d’abord, la Grande Chambre note que la CBE (A87 CBE73 et A88 CBE73 notamment) constitue un « arrangement particulier » au sens de la CUP (prévu par l’A19 CUP) et donc doit respecter cette convention (point 3 des motifs).

En particulier A88(2) CBE73, première phrase et l’A88(3) CBE73 correspondent à l’A4F de la CUP, et l’A88(4) CBE73 correspond presque mot pour mot à l’A4H de la CUP (point 6.1. des motifs).

En réalité, pour l’interprétation de « même invention » , il est possible d’avoir plusieurs interprétations (soit E la demande européenne revendiquant la priorité de la demande P) :

  • une interprétation stricte : si l’objet A est revendiqué dans la demande E, alors la priorité est valable si A est divulgué seul dans P. Si l’objet A+B est revendiqué dans la demande E, alors la priorité est non-valable si A+B n’est pas divulgué tel quel dans dans P.
  • une interprétation large : Si l’objet A+B est revendiqué dans la demande E, alors la priorité est peut être valable si A est divulgué seul dans P, mais que B est sans rapport avec la fonction et l’effet de A, et par conséquent avec le caractère et la nature de A.

Dans l’hypothèse d’une interprétation stricte, la « même invention » de A87(1) CBE73 correspond à la notion de « même objet » de l’A87(4) CBE73. Cette interprétation stricte est parfaitement en accord l’A87(4) CBE73 ou A88(2) CBE73 à A88(4) CBE73 (point 6.8). (point 6.8).

Dans l’hypothèse d’une interprétation stricte, il existe plus de difficulté. En effet :

  • l’A54(3) serait vide de sens… (point 8.1 des motifs)
  • la notion de première demande (A87(4) CBE73) deviendrait plus complexe à appréhender (point 8.2 des motifs) : en effet, si un demandeur dépose A+B puis A+B+C, il faudrait se demander si C ne serait pas une caractéristique non essentielle avant de déterminer si A+B+C est une première demande (et donc les priorités l’invoquant pourraient être non-valide) .
  • la notion de première demande (A87(4) CBE73) deviendrait subjective (point 8.3 des motifs) : en fonction des documents cités, certaines caractéristiques peuvent devenir non-essentielles ou participer à des problèmes techniques différents ;

En conséquence, il faut avoir une interprétation stricte : « même invention » signifie qu’il ne convient de reconnaître qu’une revendication figurant dans une demande de brevet européen bénéficie de la priorité que si l’homme du métier peut, en faisant appel à ses connaissances générales, déduire directement et sans ambiguïté l’objet de cette revendication de la demande antérieure considérée dans son ensemble.

G3/98 – Délai de 6 mois et divulgations non opposables en cas d’abus vis-à-vis du demandeur

La décision G3/98 a été rendue le 12 juillet 2000.

L’A55(1) CBE73 prévoit une sorte de « délai de grâce » pour le dépôt d’une demande, en cas de divulgations résultant d’un abus à l’encontre du demandeur (ex. vol, violation d’un NDA, etc.).

La question qui se posait était de savoir si ce délai devait être calculé :

  • à partir de la date de priorité(i.e prise en compte de l’A89 CBE73)
  • ou à partir de la date à laquelle la demande de brevet européen a été effectivement déposée.

Tout d’abord, aucune référence à l’A55 CBE73 ne peut être trouvée dans l’A89 CBE73 alors que ce dernier mentionne nombre d’autres articles (point 2.1 des motifs).

De plus, l’A55(1) CBE73 ne parle pas de « date de dépôt » , mais de « dépôt » (qui est plus l’acte, qu’une date éventuellement différente de la date de l’acte) (point 2.2 des motifs). L’importance du terme « dépôt » est renforcée par son utilisation dans l’A55(2) CBE73, utilisation qui ne laisse aucun doute quant à la différence avec l’expression « date de dépôt » (point 2.3).

En outre, les travaux préparatoires montrent (point 2.4 des motifs) qu’initialement l’expression utilisée était bien « date de dépôt » , mais que cela a été modifié sur demande de la délégation néerlandaise afin de bien montrer qu’il fallait comprendre la date à laquelle la demande de brevet était effectivement déposée.

En conclusion, la date déterminante pour le calcul du délai de six mois est donc bien la date à laquelle la demande de brevet européen a été effectivement déposée (sans tenir compte des priorités éventuelles).

G4/98 – Rétroactivité de la désignation et non-paiement des taxes de désignation

La décision G4/98 a été rendue le 27 novembre 2000.

Dans cette saisine du président se posait la question de l’effet du non-paiement des taxes de désignation… En effet, autant la date de dépôt que la liste des pays désignés pourraient être impactées et il est important de comprendre ce point.

En réalité, l’A91(4) CBE73 dispose que la désignation d’un pays est « réputée retirée » si la taxe de désignation correspondante n’est pas payée (point 3.1 des motifs). Les travaux préparatoires font clairement ressortir que le non-paiement des taxes de désignation n’a pas d’effet sur la date de dépôt (A90 CBE73).

Lorsque la CBE souhaite indiquer une rétroactivité, elle utilise, de l’avis de la Grande Chambre (point 3.2 des motifs), la terminologie  » non-formé » ou  » non-formulé » (cf. l’A94(2) CBE73 pour l’examen, l’A99(1) CBE73 pour l’opposition, l’A108 CBE73 pour le recours et l’A136(1) CBE73 pour une transformation) plutôt que « réputée retirée » .

De plus, la décision G1/90 (point 6) avait déjà indiqué que « réputée retirée » signifiait que la perte de droit survenait à la fin du délai considéré (point 3.3 des motifs). Une interprétation différente de la même expression dans la CBE serait dangereuse.

La rétroactivité pourrait avoir les effets suivants (point 5 des motifs) :

  • perte de la date de dépôt (ce qui serait contraire à l’A4A(3) CUP, car cette condition n’est pas une condition pour avoir un dépôt national régulier) ;
  • destruction rétroactive des demandes divisionnaires issues de cette demande puisque cette demande n’existait pas au jour du dépôt de la demande divisionnaire (ce qui serait contraire au principe d’indépendance des demandes) ;
  • destruction rétroactive des transformations.

Ainsi, de l’avis de la Grande Chambre, le non-paiement de taxes de désignation ne peut pas avoir un effet rétroactif concernant la liste des pays désignés (point 6 des motifs).

La Grande Chambre note qu’il existe des mécanismes de prorogation de délai (R85 CBE73). Néanmoins, la non-désignation ne prend pas effet à la fin du délai prorogé, mais bien à la fin du délai « normal » (point 7.2 des motifs) !

G1/99 – Exceptions au principe de non reformatio in pejus

La décision G1/99 a été rendue le 2 avril 2001.

Dans le cas présent, un opposant était le seul requérant et attaquait la décision de maintien du brevet sous une forme modifiée. Le brevet avait été modifié en opposition en ajoutant une caractéristique.

Est-il possible au titulaire de supprimer cette caractéristique durant le recours (en violation du principe de non reformatio in pejus, puisque la portée est augmentée) si cette caractéristique pose problème pour la brevetabilité du brevet ?

Il est rappelé que la décision G9/92 (ou G4/93, qui est sa version anglaise) traite justement de la reformatio in pejus, principe jurisprudentiel non écrit (point 6 des motifs) dérivé du principe de jugement ultra-petita.

Il peut être fait exception à ce principe afin de répondre à une objection nouvellement soulevée au cours de la procédure de recours, si le brevet tel que maintenu sous une forme modifiée devait sinon être révoqué, cette révocation étant la conséquence directe d’une modification irrecevable (A123(2) CBE73) que la division d’opposition avait admise.

Dans de telles circonstances, le titulaire du brevet peut être autorisé, afin de remédier à cette situation, à présenter les requêtes suivantes, dans l’ordre :

  • modifications visant limiter la portée du brevet tel que maintenu (et qui ne sont pas contraires à l’A123(2) CBE73) ;
  • modifications visant à étendre la portée du brevet tel que maintenu (mais dans les limites de l’A123(3) CBE73) ;
  • suppression de la modification irrecevable (mais dans les limites de l’A123(3) CBE73).

G2/99 – Délai de 6 mois et divulgations non opposables en cas d’abus vis-à-vis du demandeur

La décision G2/99 a été rendue le 12 juillet 2000.

C’est la même décision que la décision G3/98 (version allemande).

G3/99 – Recevabilité d’opposition conjointe

La décision G3/99 a été rendue le 18 février 2002.

En l’espèce, plusieurs parties avaient réalisé une opposition conjointe et n’avaient payé qu’une seule taxe d’opposition. Cette pratique est-elle acceptable ?

Pour la Grande Chambre, il n’y a pas de raison de rejeter cette pratique tant que les exigences formelles sont respectées (i.e. les exigences de l’A99 CBE73 et de la R55 CBE73) (points 9 et 10 des motifs).

Lors d’une opposition conjointe, c’est le représentant commun désigné conformément à la R100 CBE73 qui doit introduire le recours (sinon, la chambre doit considérer que le recours n’est pas dûment signé et doit inviter le représentant commun à le signer dans un délai donné). La personne non habilitée qui a formé initialement le recours doit en être informée. Si l’ancien représentant commun ne participe plus à la procédure, un nouveau représentant commun doit être désigné conformément à la R100 CBE73 (points 14 et 20 des motifs).

Si l’un des co-opposants se retire de la procédure, l’OEB doit en être informé par le représentant commun pour que ce retrait prenne effet (point 19 des motifs).

G1/02 – Compétence des agents des formalités

La décision G1/02 a été rendue le 22 janvier 2003.

En l’espèce, une taxe d’opposition avait été payée en dehors du délai fixé par l’A99 CBE73 et l’agent des formalités avait rendu une décision déclarant l’opposition non formée (suite à une notification de perte de droit et à une demande de décision selon R69(2) CBE73).

Cette décision a été rendue par l’agent des formalités conformément au communiqué du Vice-Président chargé de la direction générale 2 datée du 28 avril 1999 (p507, point 4 et point 6) et « visant à confier aux agents des formalités certaines tâches incombant normalement aux divisions d’opposition de l’OEB » .

Pour la Grande Chambre, la R9(3) CBE73 permet bien au président de l’Office de déléguer certaines tâches à des agents de l’OEB non qualifiés comme juriste ou ingénieur (point 3 des motifs). En outre, l’A10(2) i) CBE73 permet au président de déléguer ses pouvoirs, notamment à ses vices-présidents, s’il le souhaite (point 3.2 des motifs).

Pour la Grande Chambre, il n’existe aucune « difficulté technique ou juridique particulière » qui empêcherait une telle délégation à des agents des formalités (point 6 des motifs).

En conséquence, les délégations autorisées ne sont pas contraires aux dispositions de la CBE.

G2/02 – Priorité d’une demande d’un pays non membre de la CUP, mais des accords ADPIC

La décision G2/02 a été rendue le 26 avril 2004.

En l’espèce, un demandeur cherchait à revendiquer une priorité indienne, sachant qu’à la date de dépôt de la demande indienne l’Inde ne faisait pas partie de la CUP, mais faisait partie des accords ADPIC (attention, l’OEB ne fait pas partie des accords ADPIC, mais seulement partie de la CUP).

Bien que le contenu de la CUP et de l’accord ADPIC soit sensiblement identique concernant les priorités, l’A87(1) CBE73 est claire (point 2 des motifs) : la priorité n’est possible que pour les adhérents à la CUP. Vouloir modifier ou interpréter largement ce point serait en réalité vouloir se substituer au législateur qui a seul le pouvoir de corriger cette erreur (points 8.3 et 8.6 des motifs).

Bien que les dispositions de l’A87(5) CBE73 permettent une priorité « ad-hoc » et réciproque, jamais aucune communication du Conseil d’administration n’est venue valider cette priorité avec l’Inde (point 3.2 des motifs).

Cette décision n’est plus d’actualité, car l’A87(1) CBE a changé et mentionne maintenant les « membres de l’Organisation Mondiale du Commerce » (qui ont tous ratifié l’accord ADPIC).

G3/02 – Priorité d’une demande d’un pays non membre de la CUP, mais des accords ADPIC

La décision G3/02 a été rendue le 26 avril 2004.

Cette décision est identique à la décision G2/02.

G1/03 – Disclaimers

La décision G1/03 a été rendue le 8 avril 2004.

La question qui se posait était de savoir si un disclaimer pouvait être admis, quand bien même il ne serait pas supporté par la description (A123(2) CBE73).

Un « disclaimer » s’entend d’une modification apportée à une revendication ayant pour effet d’introduire dans la revendication une caractéristique technique « négative », qui exclut normalement d’une caractéristique générale des modes de réalisation ou des domaines particuliers (point 2 des motifs).

Un disclaimer peut être admis s’il vise à :

  • rétablir la nouveauté par rapport à un état de la technique A54(3) CBE73 et A54(4) CBE73 (donc aujourd’hui A54(3) CBE seulement) ;
  • rétablir la nouveauté par rapport à une divulgation fortuite A54(2) CBE73 (i.e. si étrangère à l’invention revendiquée et si éloignée d’elle que l’homme du métier ne l’aurait jamais prise en considération) (point 2.3.4 des motifs) ; et
  • exclure un objet qui tombe sous le coup d’une exception à la brevetabilité en vertu des A52 CBE73 à A57 CBE73 pour des raisons non techniques (point 2.4.3 des motifs, en effet, et notamment pour le PCT, la connaissance de l’ensemble des exclusions peut être complexe pour le déposant).

Un disclaimer ne doit pas retrancher plus que ce qui est nécessaire.

Si un disclaimer est pertinent pour l’appréciation de l’activité inventive ou de la suffisance de l’exposé, alors celui-ci est contraire à l’A123(2) CBE73 (point 2.6.1 des motifs).

G2/03 – Disclaimers

La décision G2/03 a été rendue le 8 avril 2004.

Cette décision est identique à la décision G1/03.

G3/03 – Remboursement de la taxe de recours et révision préjudicielle

La décision G3/03 a été rendue le 28 janvier 2005.

La R67 CBE73 dispose qu’en cas de révision préjudicielle, la taxe de recours peut être remboursée par l’instance dont la décision a été attaquée. Mais peut-elle rejeter ce remboursement ?

Tout d’abord, la Grande Chambre fait remarquer (point 2 des motifs) que le recours préjudiciel permet de faire droit au recours (si « le remboursement est équitable en raison d’un vice substantiel de procédure« ), mais l’instance dont la décision a été attaquée ne peut ni rejeter ce recours ni le déclarer non recevable ou non fondé (A109(1) CBE73 et A109(2) CBE73).

Bien entendu, il est nécessaire que le requérant demande ce remboursement pour qu’il soit fait droit (point 3 des motifs).

D’un point de vue de l’efficacité de la procédure (point 3.4.3 des motifs), la Grande Chambre pense qu’il est préférable laisser la chambre de recours décider du rejet ou non de la demande de remboursement, quand bien même l’instance dont la décision a été attaquée a fait droit par voie de révision préjudicielle.

Ainsi, l’instance du premier degré dont la décision a été attaquée n’a pas compétence pour rejeter la requête en remboursement de la taxe de recours. La chambre de recours est compétente (dans la composition définie par l’A21 CBE73, comme s’il n’avait pas été fait droit par voie de révision préjudicielle).

G1/04 – Méthode de diagnostic

La décision G1/04 a été rendue le 16 décembre 2005.

La raison de cette saisine était « simplement » le manque de clarté de l’interdiction de l’A52(4) CBE73 (maintenant A53 c) CBE) : mais qu’est-ce donc « une méthode de diagnostic » ?

Après de longs développements, la Grande Chambre indique qu’est exclue la revendication qui comprend TOUTES les caractéristiques suivantes :

  • la phase de décision déductive en médecine, en tant qu’activité purement intellectuelle (point 5.2 des motifs),
  • les étapes précédentes qui sont constitutives de la pose de ce diagnostic (point 5.3 des motifs), et
  • les interactions spécifiques « appliquées au corps humain ou animal » (sans condition de type ou d’intensité, i.e. nécessitant simplement la présence du corps) qui surviennent lorsque sont mises en œuvre celles des étapes précédentes qui sont de nature technique.

S’il manque une étape, ce n’est, tout au plus, qu’un traitement de données (point 6.2.2 des motifs) ou qu’une acquisition de données.

Il est sans effet de savoir, pour savoir si un procédé doit être exclu au titre de la « méthode de diagnostic » , si un praticien participe ou doit participer aux opérations (présence ou responsabilité, point 6.1 des motifs).

G2/04

La décision G2/04 a été rendue le 25 mai 2005.

Transmission/cession d’une opposition

Comme dans la décision G4/88, une chambre de recours s’est posé la question de savoir si une opposition pouvait être librement cédée. Pour la chambre de recours ayant réalisé la saisine, la décision G4/88 ne s’appliquait pas au cas d’une cession de filiale détenue à 100 % sachant que l’opposition avait été initiée par la maison mère.

Pour la Grande Chambre (point 2.1.1 des motifs), la décision G4/88 ne s’est pas prononcée sur le fait qu’une opposition pouvait être cédée. En revanche, la décision G3/97 (point 2.2 de cette décision) a bien dit qu’une cession d’une opposition n’était pas libre.

Il est clair que (point 2.1.2 des motifs) la qualité d’un titulaire est l’accessoire d’un brevet. Néanmoins, on ne peut pas traiter de manière identique le titulaire et l’opposant, car les situations juridiques sont différentes : l’opposition est une action sans titre et n’est donc pas l’accessoire d’une quelconque entité.

Dans la décision G4/88, la Grande Chambre validait la transmission de la qualité d’opposant lors de la transmission d’une partie des activités économiques d’une entreprise. Néanmoins, pour la Grande Chambre, la notion de « partie des activités économiques d’une entreprise » ne saurait être assimilée à la vente d’une filiale ayant elle-même ses activités (point 2.2 des motifs).

En effet, la filiale aurait très bien pu former une opposition (éventuellement une co-opposition), ce qui n’était pas possible dans la situation des motifs G4/88 (car « l’activité d’une entreprise » n’a pas de personnalité morale, point 2.2.1 des motifs).

En conséquence, la qualité d’opposant ne peut être librement transmise, quand bien même l’opposition serait dans l’intérêt d’une de ses filiales cédées.

Identité du requérant concernant un recours sur la titularité d’une action

Comme vous l’avez compris, on ne savait pas ici si l’opposition pouvait être cédée et donc on ne savait pas qui avait la possibilité d’introduire l’action.

La Grande Chambre propose une approche pragmatique : même si les actes de procédure ne doivent normalement pas comporter de conditions (point 3.2.1 des motifs), il est possible, pour éviter toute insécurité juridique, de déposer le recours au nom de la personne la plus probable (interprétation subjective donc… ) et à titre subsidiaire, au nom d’une autre personne, selon une autre interprétation possible.

G3/04 – Intervention pendant le recours puis retrait du recours

La décision G3/04 a été rendue le 22 août 2005.

Dans cette affaire, la question qui se posait était de savoir si un recours pouvait continuer avec un intervenant, alors que le seul requérant avait retiré son recours.

Pour la Grande Chambre (point 5 des motifs), l’intervenant doit nécessairement acquitter la taxe d’opposition (A105(2) CBE73) afin de pouvoir intervenir, quand bien même cela ne serait qu’au stade du recours.

Pour autant, l’A107 CBE73 ne prévoit pas que l’intervenant puisse acquérir le statut de requérant s’il fait une intervention à ce stade de la procédure (point 6 des motifs). En effet, seules peuvent former recours les parties à l’opposition (et l’intervenant ne l’était pas).

Le fait de faire partie de droit à la procédure ne signifie pas pour autant que l’intervenant est requérant.

Ainsi, si l’unique recours a été retiré, la procédure ne peut pas se poursuivre avec une partie qui est intervenue pendant la procédure de recours.

G1/05 (1) – Exclusion et récusation

Si le membre d’une chambre de recours avance, dans sa déclaration d’abstention, une raison pouvant constituer en soi un motif éventuel de récusation pour partialité, la décision relative au remplacement du membre concerné de la chambre doit normalement en tenir dûment compte (point 7 des motifs).

Dans la procédure devant la Grande Chambre de recours, s’il n’existe pas de circonstances particulières jetant le doute sur la capacité d’un membre de la Chambre à apprécier ultérieurement les arguments d’une partie avec impartialité, un membre de la Grande Chambre de recours ne saurait éveiller de soupçon de partialité au motif qu’une chambre de recours dont faisait partie le membre concerné a pris position sur la question dans une décision antérieure (point 27 des motifs).

G1/05 (2) – Correction d’une demande divisionnaire lorsque la demande mère n’est plus en instance

La décision G1/05 a été rendue le 28 juin 2007.

Pour rappel, l’A76(1) CBE73 dispose :

Une demande divisionnaire [… ] ne peut être déposée que pour des éléments qui ne s’étendent pas au-delà du contenu de la demande initiale telle qu’elle a été déposée

En l’espèce, il se posait la question de savoir si une demande divisionnaire qui s’étend, à sa date de dépôt effective, au-delà du contenu de la demande initiale (i.e. non-respect de A76(1) CBE73) peut être corrigée a posteriori, quand bien même la demande mère n’est plus en instance.

La Grande Chambre fait remarquer (point 2.6 des motifs) que, initialement, la CBE contenait deux dispositions qui visait respectivement à traiter les conflits les exigences de défense nationale (car les demandes divisionnaires sont déposées à l’OEB directement) et à éviter que la demande en instance ne contienne des éléments ajoutés. La disposition actuelle de l’A76(1) CBE73 résulte de la fusion de ces dispositions et il n’y a pas de raison particulière pour interpréter différemment cette disposition. L’objectif de cette disposition est donc (point 2.7 des motifs) :

  • définir une condition de forme en vue d’empêcher les demandeurs d’ajouter à une demande divisionnaire des éléments nouveaux qui pourraient appeler des objections au titre de la sécurité nationale et
  • définir la condition de fond de la brevetabilité des demandes divisionnaires, à savoir que ces dernières ne peuvent contenir aucun élément ajouté par rapport à la demande dont elles sont issues.

Ainsi, pour la Grande Chambre, le fait d’avoir une demande divisionnaire qui ne satisfait pas aux exigences de l’A76(1) CBE73 lors de son dépôt n’est pas un motif de non-validité de cette demande (point 2.9 des motifs).

A priori, l’A96(2) CBE73 s’applique (point 3.4 des motifs) et il est possible de modifier sa demande divisionnaire afin de la faire respecter l’A76(1) CBE73 (point 3.6 et point 7 des motifs). Les travaux préparatoires vont dans ce sens (point 4.2 des motifs).

Le fait que la demande mère est instance ou non est sans effet (point 8.1 des motifs), car la demande divisionnaire est une nouvelle demande indépendante.

G1/06 – Cascade de demandes divisionnaires

La décision G1/06 a été rendue le 28 juin 2007.

Elle reprend les mêmes faits et mêmes motifs que la décision G1/05, mais la décision est distincte.

La question qui se posait ici était de savoir comment traiter les cascades de demandes divisionnaires au regard de l’A76(1) CBE73 : doit-on regarder que la demande précédente ou toute la cascade des demandes divisionnaires pour connaitre les « éléments de la demande initiale » ?

Tout d’abord, la Grande Chambre fait remarquer que, bien que non explicitement mentionnées dans l’A76(1) CBE73, les demandes divisionnaires de demandes divisionnaires (i.e. cascade de divisionnaires) semblent possibles puisqu’une demande divisionnaire est une demande comme une autre (point 10.2 des motifs).

Pour la Grande Chambre, il n’est possible d’attribuer la date de dépôt de la demande initiale que si la demande divisionnaire contient effectivement des éléments de cette demande initiale et que toutes les demandes divisionnaires intermédiaires contiennent également ces éléments.

Un élément qui aurait été omis lors du dépôt d’une demande antérieure de la série ne peut être réintroduit dans cette demande ni dans aucune demande divisionnaire qui la suit dans la série (point 11.2 des motifs).

G2/06 – Utilisation d’embryons

La décision G2/06 a été rendue le 25 novembre 2008.

Suite à la directive 98/44/EC du parlement européen, les règles R23ter CBE73 à R23sexies CBE73 ont été ajoutées au règlement d’exécution (décision en date du 16 juin 1999 du conseil d’administration, entrée en vigueur le 1er septembre 1999). En particulier, la R23quinquies c) CBE73 dispose que les brevets européens ne sont pas délivrés pour « des utilisations d’embryons humains à des fins industrielles ou commerciales » comme étant contraires à l’ordre public (A53 a) CBE73).

La question était alors de savoir si la R23quinquies c) CBE73 s’appliquait rétroactivement aux demandes déposées avant l’entrée en vigueur de cette règle.

Sur cette question, il a été demandé à la Grande Chambre d’effectuer un recours préjudiciel auprès de la CJUE. La Grande Chambre considère que rien ne l’y oblige et même que rien ne l’y autorise (points 3 à 11 des motifs) : si cela est le cas pour des instances judiciaires nationales (article 234 du Traité CE) la Grande Chambre est plutôt une organisation internationale dont les États contractants ne sont pas tous membres de l’UE (point 4 des motifs).

Pour la Grande Chambre (point 13 des motifs), le fait que le conseil ne prévoit pas de disposition transitoire est le signe indubitable que ces règles doivent être appliquées immédiatement à toutes les demandes en instance. Ceci est renforcé par la référence à l’A53 a) CBE73 : cette liste vient simplement expliciter un article déjà présent et rien n’indique que l’exploitation commerciale des embryons humains n’ait jamais été considérée comme brevetable..

La R23quinquies c) CBE73 exclue explicitement « les utilisations d’embryons humains » : faut-il penser que les produits qui ne peuvent être obtenus que via l’utilisation d’embryons humains (tout du moins à la date de dépôt) sont autorisés ?

Pour la Grande Chambre, la formulation de la revendication (i.e produit vs. procédé) ne doit pas jouer (point 22 des motifs). Sinon, il suffirait de rédiger habilement et judicieusement sa revendication pour éviter l’exclusion… ce qui serait contraire à l’objectif poursuivi : le respect de la dignité humaine.

Ainsi, des produits obtenus via l’utilisation d’embryons humains doivent également être interdits (même si après la date de dépôt on trouve une méthode n’utilisant pas d’embryons humains, point 33 à 35).

G1/07 – Méthode chirurgicale

La décision G1/07 a été rendue le 15 février 2010 (le texte français n’est pas disponible en HTML donc voici la décision G1/07 en format PDF qui a été publiée dans le JO 2011, 134).

La question qui se posait ici était de savoir si, dans un procédé majoritairement non chirurgical, une « petite interaction » avec le corps humain (comme l’injection d’un produit de contraste dans une veine) devait être exclue au titre de l’exclusion des « méthodes chirurgicales » (A52(4) CBE73 ou A53 c) CBE) même si son but n’était pas de soigner ou de maintenir en vie la personne.

Pour la Grande Chambre, il est clair que la revendication d’une seule étape « chirurgicale » fait tomber la revendication sous l’interdiction de l’A53 c) CBE (point 3.2.5 des motifs).

Il n’est pas important de connaitre le but de cette étape « chirurgicale » : qu’elle soit réalisée pour soigner, pour diagnostiquer ou à des fins esthétiques, la réponse est la même (point 3.3.2.5 à point 3.3.10 des motifs). En effet, s’il fallait comprendre « méthode chirurgicale » par « méthode chirurgicale dans un but thérapeutique » , cette exclusion serait déjà couverte par l’interdiction des « méthodes thérapeutiques » et ne servirait donc à rien.

Le fait que la décision G1/04 (point 6.2.1 de cette décision) ait indiqué que « Les méthodes chirurgicales au sens de l’article 52(4) CBE incluent toute intervention physique sur le corps humain ou animal dans laquelle le maintien de la vie et de la santé du sujet est d’une importance primordiale » signifie en réalité (point 3.3.5 des motifs) que les méthodes chirurgicales sont des méthodes nécessitant une attention particulière provoquée par le danger que celles-ci font courir à la personne qui subit l’intervention.

En clair (point 3.4.2.7 des motifs) la Grande Chambre considère qu’une étape chirurgicale est ;

  • étape invasive,
  • représentant une intervention physique substantielle sur le corps,
  • qui nécessite une expertise médicale professionnelle,
  • et qui présente un risque pour la santé, même lorsqu’il est effectué avec les soins professionnels et l’expertise nécessaires.

Attention, le risque pour la santé doit être lié au mode d’administration et non pas à un autre élément (ex à l’agent de contraste injecté en tant que tel qui pourrait être allergène) (point 3.4.2.3 des motifs).

Il est bien sûr possible de prévoir un « disclaimer » pour écarter une application chirurgicale sur le corps humain ou animal.

Il est également possible d’omettre une étape si la revendication reste claire (point 4.3.1 des motifs). En particulier, on peut chercher à utiliser des formulations comme « préinjectées » , etc.

G2/07 – Procédé essentiellement biologique

La décision G2/07 a été rendue le 9 décembre 2010 (le texte français n’est pas disponible en HTML donc voici la décision G2/07 en format PDF qui a été publiée dans le JO 2012, 130).

On l’appelle la décision « Broccoli » 🙂

Comme vous le savez, l’A53 b) CBE dispose que « les procédés essentiellement biologiques d’obtention de végétaux ou d’animaux » sont exclus de la brevetabilité même si on accepte les « procédés microbiologiques » .

Selon la R26(5) CBE, un procédé d’obtention de végétaux ou d’animaux est essentiellement biologique « s’il consiste intégralement en des phénomènes naturels tels que le croisement ou la sélection » .

En l’espèce, il était revendiqué un procédé non microbiologique d’obtention de végétaux comportant une étape de croisement, mais également une étape de sélection. Ce procédé est-il brevetable si le procédé comprend une étape « technique » (en plus ou dans une étape de croisement / sélection) ?

Pour la Grande Chambre (point 6.4.2.3 des motifs) :

  • doit être exclu un procédé comportant une étape de croisement et une étape de sélection et que l’intervention humaine a pour but de permettre l’exécution de ces étapes.
  • ne doit pas être exclu un procédé comportant une étape de croisement, une étape de sélection et une étape supplémentaire de nature technique :
    • qui introduit de façon autonome un caractère dans le génome ou modifie un caractère dans le génome (l’introduction ou la modification de ce caractère ne résulte pas du mélange des gènes des végétaux choisis pour le croisement par voie sexuée) ;
    • qui est exécutée dans le cadre des étapes de croisement et de sélection (il convient donc de faire abstraction de toute étape technique supplémentaire qui est exécutée soit avant, soit après le procédé de croisement et de sélection).

G1/08 – Procédé essentiellement biologique

La décision G1/08 a été rendue le 9 décembre 2010 (le texte français n’est pas disponible en HTML donc voici la décision G1/08 en format PDF qui a été publiée dans le JO 2012, 206).

Elle reprend les mêmes faits et motifs que la décision G2/07.

G2/08

La décision G2/08 a été rendue le 19 février 2010 (le texte français n’est pas disponible en HTML donc voici la décision G2/08 en format PDF qui a été publiée dans le JO 2010, 456).

Dosage/Posologie d’un médicament

En l’espèce, la chambre de recours se demandait si une « utilisation d’un produit X pour produire médicament pour un traitement de la maladie Y par voie orale une fois par jour » pouvait être brevetable si cette utilisation était connue sauf concernant la posologie.

Comme vous le savez, l’A54(5) CBE (anciennement A54(5) CBE73) dispose qu’une substance connue peut être brevetable si elle peut être utilisée comme médicament (on parle de « premier effet thérapeutique« ).

De plus, l’A54(5) CBE (qui n’avait pas d’équivalent en CBE73) dispose qu’une substance connue peut être brevetable « pour toute utilisation spécifique » jusqu’à là inconnu (on parle de « deuxième effet thérapeutique« ). Ainsi, le vide juridique qui existait auparavant (et qui a été comblé par la décision G6/83 de la Grande Chambre de recours) n’existe plus (point 5.9 des motifs).

Pour la Grande Chambre, il n’y a pas lieu d’interpréter « pour toute utilisation spécifique » de manière restrictive (i.e. « pour soigner une nouvelle maladie » , point 5.9.1.1 des motifs, point 5.10 des motifs), car cela serait contraire à l’interprétation courante de cette expression.

Ainsi, il convient d’accepter la brevetabilité d’un « traitement thérapeutique différent » si, bien sûr, les conditions de nouveauté et d’activité inventive sont respectées (point 5.10.9 des motifs).

Ce traitement thérapeutique différent peut très bien être une « posologie » (point 6.1 des motifs). Ainsi, une nouvelle posologie peut permettre de rendre brevetable une revendication (point 6.2 des motifs).

Fin des revendications de type suisse

Comme l’A54(5) CBE n’existait pas sous le régime de la CBE73, la Grande Chambre avait autorisé les revendications de type suisse dans la décision G6/83 (point 7.1.1 des motifs) :

  • au lieu de revendiquer « Médicament contenant le composé X pour une utilisation thérapeutique Y » ,
  • on revendiquait « Utilisation d’un composé X afin d’obtenir un médicament destiné à une utilisation thérapeutique Y » .

En effet, la première formulation ne permettait pas de surmonter les problèmes de nouveauté. Depuis la CBE 2000, cette problématique a disparu et il n’y a plus lieu d’appliquer la jurisprudence précédente (point 7.1.2 des motifs).

Les revendications de type suisse posaient, en effet, le problème (point 7.1.3 des motifs) de l’absence de toute relation fonctionnelle entre :

  • les caractéristiques thérapeutiques (conférant éventuellement nouveauté et activité inventive) et
  • le procédé de fabrication revendiqué.

Ainsi, il convient de ne plus utiliser le formalisme des revendications de type « suisse » (applicable à partir de 3 mois à compter des motifs de la Grande Chambre).

G3/08 – Programme d’ordinateur

La décision G3/08 a été rendue le 12 mai 2010 (le texte français n’est pas disponible en HTML donc voici la décision G3/08 en format PDF qui a été publiée dans le JO 2011, 10).

En l’espèce, le président avait saisi la Grande Chambre de recours (en vertu A112(1) b) CBE), car il lui semblait que certaines décisions étaient « divergentes » concernant la brevetabilité des logiciels :

  • T 1173/97 : cette décision met l’accent sur la fonction du programme d’ordinateur (le programme revendiqué a-t-il un caractère technique ?) et ignore complètement la formulation de la revendication (en l’espèce, la chambre accepte la formulation « programme informatique » , car celui-ci possède, en puissance, la capacité de produire un effet technique « supplémentaire ») ;
  • T 424/03 : cette décision met l’accent sur la formulation de la revendication (en l’espèce, la chambre refuse la formulation « programme informatique » , mais accepte « produit programme d’ordinateur » , ou « méthode mise en œuvre par ordinateur« )

Pour la Grande Chambre, « décisions divergentes » et « évolution du droit » ne doivent pas être confondues : l’évolution du droit ne permet pas une saisine valable de la Grande Chambre au titre de l’A112(1) b) CBE (point 7.3.1 des motifs).

En effet, il peut arriver que les chambres de recours changent de fusil d’épaule (éventuellement de manière radicale) en déclarant que la pratique antérieure n’est plus pertinente (point 7.3.5) : dans cette hypothèse, il n’y a pas de divergences, car il est clair que l’ancienne pratique ne doit plus être suivie.

Selon la Grande Chambre (point 10.9 à 10.12 des motifs), il convient de considérer qu’il n’y a pas de divergence entre ces deux décisions, mais plutôt une évolution naturelle de la jurisprudence (car seul change le fondement légal du rejet ou de la délivrance et non la décision en tant que telle, point 10.13 des motifs).

En conséquence, la saisine du président n’est pas valable.

G4/08 – Langue de la procédure lors d’entrée en phase PCT

La décision G4/08 a été rendue le 16 février 2010 (bien que la décision soit en français, voici également la décision G4/08 en format PDF qui a été publiée dans le JO 2010, 572).

En l’espèce, la question qui se posait était de savoir s’il était possible de choisir librement sa langue de procédure (éventuellement par le dépôt d’une traduction) si la demande PCT avait déjà été publiée dans une langue de l’office.

L’A14(3) CBE dispose que « la langue officielle de l’Office européen des brevets dans laquelle la demande de brevet européen a été déposée ou traduite doit être utilisée comme langue de la procédure » (point 3.2 des motifs).

Pour la Grande Chambre (point 3.4 des motifs), le fait que l’A153 CBE fasse clairement la distinction entre les langues de l’office et les autres langues permet de comprendre que l’expression « une autre langue » de l’A153(4) CBE fait bien référence à « une autre langue que les langues de l’office » et non « une autre langue que celle voulue par le demandeur comme langue de procédure » . De plus, la référence à la protection provisoire vient renforcer ce point : comment comprendre sinon que la protection provisoire soit refusée sous prétexte d’avoir été publiée en français alors que la langue de la procédure voulue est l’anglais ?

Aucune disposition du PCT (et notamment sa R49.2 PCT) ne prévoit la possibilité de choisir la langue officielle si la demande est déjà dans une des langues autorisées (point 2.8 et point 3.6 des motifs).

Ainsi, il n’est pas possible de choisir librement la langue de la procédure (en traduisant éventuellement sa demande) si la langue de publication PCT est déjà une des langues officielles (point 3.10 des motifs).

De même, l’OEB ne peut pas autoriser, en cours de procédure, la substitution à la langue de la procédure de l’une de ses autres langues officielles en tant que nouvelle langue de la procédure. En effet, cette possibilité a été supprimée de la R3(1) CBE73 en 1991 et ne saurait être rajouté par voir prétorienne (point 4.5 des motifs).

G1/09 – Demande en instance et demande divisionnaire

La décision G1/09 a été rendue le 27 septembre 2010 (le texte français n’est pas disponible en HTML donc voici la décision G1/09 en format PDF qui a été publiée dans le JO 2011, 336).

Comme vous le savez, la R36(1) CBE dispose qu’il est possible de « déposer une demande divisionnaire relative à toute demande de brevet européen antérieure encore en instance » .

LA question qui se posait était de savoir si une demande qui a été rejetée demeure en instance jusqu’à l’expiration du délai de recours, lorsqu’aucun recours n’a été formé. Ou avant ?

En effet, il n’existe pas de définition dans la CBE de « demande en instance » (point 3.1 des motifs).

Tout d’abord, il convient de ne pas confondre « procédure en instance » et « demande en instance » (point 3.2.2 des motifs), la procédure pouvant être suspendue alors que la demande est toujours en instance.

La signification de « demande en instance » dans la R36(1) CBE se rapporte au droit procédural du demandeur d’effectuer une action : la division (point 3.2.3 des motifs). Ainsi, les droits substantiels que confère la CBE à la demande existent toujours lorsque la demande peut être divisée (point 3.2.4 des motifs).

Or, l’A67(4) CBE montre clairement que les droits substantiels, que confère la demande de brevet, disparaissent après qu’elle « a été rejetée en vertu d’une décision passée en force de chose jugée » . Ainsi, il est nécessaire que la décision de rejet soit définitive pour que les droits substantiels disparaissent (point 4.2.1 des motifs).

Par voie de conséquence, une demande peut être divisée, même si celle-ci est rejetée, mais jusqu’à l’expiration du délai de recours (point 4.2.4 des motifs) même si aucun recours n’est formé.

G1/10 – Correction d’un brevet par la voie d’une correction d’une décision

La demande G1/10 a été rendue le 23 juillet 2012 (le texte français n’est pas disponible en HTML donc voici la décision G1/10 en format PDF qui a été publiée dans le JO 2013, 194).

La R140 CBE dispose :

Dans les décisions de l’Office européen des brevets, seules les fautes d’expression, de transcription et les erreurs manifestes peuvent être rectifiées.

En l’espèce, un demandeur pouvait invoquer la R140 CBE afin de corriger le texte délivré d’un brevet (par exemple, dans une procédure d’opposition). L’articulation avec la procédure en instance (ex parte vs. inter partes) posait notamment question à la chambre de recours.

Pour la Grande Chambre (point 5 des motifs), il n’est pas possible de corriger un brevet à l’aide la R140 CBE (et cela avait déjà été dit pour la R89 CBE73 dans la décision G1/97). En effet, il ressort des travaux préparatoires que le législateur voulait éviter que les tiers puissent un préjudice.

En tout état de cause, à compter de sa délivrance, un brevet européen ne relève plus de la compétence de l’OEB (point 6 des motifs).

Il convient de noter que le demandeur peut tout à fait corriger une erreur manifeste avant la délivrance au moyen de la R139 CBE (point 9 des motifs). De plus, le demandeur dispose d’un délai de 4 mois pour donner son accord sur le texte délivré (point 10 des motifs). Si l’OEB rend une décision non conforme à l’accord du demandeur, celui-ci peut alors formé recours, car celui-ci a été lésé par la violation de l’A113(2) CBE (point 12 des motifs).

En conclusion, la R140 CBE permet de rectifier des erreurs contenues dans des décisions de l’OEB (hors délivrance), et non des erreurs figurant dans des pièces produites par un demandeur de brevet ou le titulaire d’un brevet (point 11 des motifs).

G2/10 – Disclaimer et A123(2)

La décision G2/10 a été rendue le 30 août 2011 (le texte français n’est pas disponible en HTML donc voici la décision G2/10 PDF qui a été publié dans le JO 2012, 376).

La question qui se posait était de savoir si un disclaimer pouvait être contraire à l’A123(2) CBE si le mode de réalisation exclue était explicitement décrit dans la demande.

De l’avis de la Grande Chambre, bien que le sujet des disclaimers a été largement discuté dans la décision G1/03 (point 3.9 des motifs), cette décision n’aborde pas la problématique de la présente question : celui d’un disclaimer qui vise pourtant un mode de réalisation (ou plus généralement, un objet) décrit.

En tout état de cause, la décision G1/03 n’a jamais affirmé que l’introduction d’un disclaimer ne changeait jamais le contenu technique de la demande (point 4.4.2 des motifs).

Ainsi, et conformément à l’application de l’A123(2) CBE, il convient de vérifier que l’introduction du disclaimer n’apporte pas de nouvelles informations techniques à l’homme du métier (point 4.5.1 des motifs, déduction direct et sans ambiguïté de la demande telle que déposée en se fondant sur ses connaissances générales).

Par exemple, si l’introduction d’un disclaimer provoque de fait la sélection dans un intervalle d’un sous-intervalle non- écrit, il sera probable que ce disclaimer ne devrait pas être autorisé (point 4.5.4 des motifs)

Pour déterminer si c’est le cas ou non, il est nécessaire de procéder à une évaluation au cas par cas portant sur l’ensemble des aspects techniques, en tenant compte :

  • de la nature et de l’étendue de la divulgation dans la demande telle que déposée,
  • de la nature et de l’étendue de l’objet exclu,
  • ainsi que de sa relation avec l’objet restant dans la revendication telle que modifiée.

A priori, le fait que le mode de réalisation exclu est divulgué dans la description est sans importance (point 4.5.5 des motifs) : en effet, le demandeur peut choisir le mode de réalisation qu’il souhaite et il n’est pas obligé de tous les intégrer.

G1/11 – Compétence des chambres de recours juridiques

La décision G1/11 a été rendue le 19 mars 2014.

Dans cette affaire, une chambre de recours juridique avait été saisie pour connaître d’un recours contre une décision par laquelle une division d’examen avait refusé le remboursement de taxes de recherche (problème de non-unité d’invention).

La chambre juridique était gênée car même si formellement l’A21(3) c) CBE la désigne comme compétente (car A21(3) a) CBE et A21(3) b) CBE non applicable), la non-unité d’invention est un problème d’appréciation technique.

La Grande Chambre partage l’avis de cette chambre de recours juridique : elle souligne que l’esprit de l’A21(3) c) CBE était de confier à la chambre juridique que des questions purement juridiques.

Dès lors, et devant ce vide juridique, la Grande chambre indique que doit être compétent une chambre technique pour les problèmes de remboursement de la taxe de recherche visé à la R64(2) CBE.

G1/12 – Correction du nom du requérant

La décision G1/12 a été rendue le 30 avril 2014.

Dans cette affaire, une chambre de recours se demandait s’il était possible de corriger le nom du requérant (selon la R101(2) CBE ou selon le R139 CBE) si l’intention véritable était de déposer au nom de la personne qui aurait dû déposer le recours.

Selon la Grande Chambre, il est tout à fait possible de corriger le nom du requérant :

  • à l’aide de la R101(2) CBE, si, dans le délai ouvert pour le recours, le requérant est identifiable :
    • il faut évaluer l’intention véritable du requérant, intention qui est évaluée en fonction du principe de libre évaluation de la preuve ;
  • à l’aide de laR139 CBE, dans les conditions prévues par la jurisprudence même en dehors du délai de recours :
    • le requérant supporte la charge de la preuve, qui doit être d’un niveau élevé.

G2/12 – Produit obtenu par un procédé essentiellement biologique

La décision G1/12 a été rendue le 23 mars 2015.

On l’appelle la décision « Tomatoes II » .

Dans cette affaire, les membres d’une chambre de recours se demandaient si l’exclusion de la brevetabilité des procédés essentiellement biologiques d’obtention de végétaux (A53 b) CBE) emportait exclusion des produits obtenus par ces procédés.

La Grande Chambre ne voit aucune raison expliquant cette exclusion : les produits obtenus par des procédés exclus peuvent tout à fait être brevetés (même si ceux-ci sont revendiqués sous la forme d’un product-by-process).

G1/13 – Statut d’une partie / application de la loi nationale

La décision G1/13 a été rendue le 25 novembre 2014.

Dans cette affaire, la Grande Chambre rappelle la suprématie de la loi nationale des Etats concernant la qualification des personnalités juridiques.

Si une société est dissoute, mais que rétroactivement sa personnalité juridique est restaurée, les chambres de recours n’ont pas de raison de ne pas prendre en compte cette restauration rétroactive.

G2/13 – Produit obtenu par un procédé essentiellement biologique

La décision G2/13 a été rendue le 23 mars 2015.

On l’appelle la décision « Broccoli II » .

Cette décision est identique à la décision G2/12.

G1/14 – Signification par un moyen différent que la LRAR

La décision G1/14 a été rendue le 19 novembre 2015.

En réalité, dans cette affaire la grande chambre a jugé la question irrecevable et n’a donc pas répondu à la question posée.

Pour autant, la grande chambre vient préciser que, si une décision n’est pas remise par recommandé avec accusé de réception, comme requis par la R126(1) CBE (mais, par exemple, à l’aide de UPS), il existe un vice de signification.

En effet, la première phrase de la R126(2) CBE ne peut être satisfaite : dès lors, aucun délai ne peut commencer à courir, quand bien même il serait attesté que le destinataire aurait reçu ce document

G3/14 – Clarté en opposition

La décision G3/14 a été rendue le 24 mars 2015.

Dans cette affaire, une chambre de recours juridique avait été saisie pour connaître de questions relatives à l’examen de la clarté en procédure d’opposition. La question était de savoir dans quelle mesure la clarté d’une revendication modifiée pouvait être examinée.

Nous savons que les modifications apportées en cours d’opposition doivent être claires (A101(3) CBE ensemble A84 CBE) même si cela n’est pas un motif d’opposition (T301/87).

Pour autant, la division d’opposition peut-elle examiner la clarté d’une simple combinaison de deux revendications existantes ou peut-elle simplement examiner la clarté liée à la modification apportée (ex. changement d’un terme) ?

La Grande Chambre considère que l’on ne peut pas avoir une interprétation extensive de l’A101(3) CBE : les objections de clarté doivent avoir leur origine dans les modifications apportées.

3 commentaires :

  1. Bonjour,

    Merci bcp pour votre blog. C’est un trés bon résumé !
    Petite remarque concernant G2/98:
    Dans l’hypothèse d’une interprétation large (et non stricte), il existe plus de difficulté…
    Bien à vous,

  2. Bonjour,
    Bravo pour votre blog qui est une référence dans le domaine.
    Concernant la G1/99, les deux dernière modifications possible pour le titulaire ne se font pas dans le respect de 123(2) mais de 123(3) il me semble.

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