Langue de procédure et langues officielles

Dépôt d’une demande

Principe

Depuis l’entrée en vigueur de la CBE 2000, il n’existe aucune condition de langue pour le dépôt (i.e. obtention d’une date de dépôt).

Si la demande est déposée dans une langue officielle, il n’y a rien à faire et cette langue officielle devient la langue de la procédure

Si la demande n’est pas déposée dans une langue officielle (A14(2) CBE), il est nécessaire de produire une traduction dans une des langues officielles sous 2 mois (R6(1) CBE). La langue de cette traduction devient la langue de la procédure.

Attention : les dispositions de l’A14(4) CBE ne s’applique pas au dépôt d’une demande (donc le délai est bien de 2 mois pour remettre la traduction), même si la réduction de taxe de la R6(3) CBE est bien ouverte pour les déposants :

  • ayant leur domicile (ou leur siège social) dans un des États contractants (ou s’il est le national d’un de ces États ayant son domicile à l’étranger),
  • que ce pays à une langue officielle autre que l’allemand, l’anglais ou le français,
  • qui déposent leur demande dans une de ces langues (ou qu’il fait un renvoi vers une demande antérieure dans une de ces langues).

Dépôt en plusieurs langues

Dans la décision T382/94, la chambre de recours a indiqué que si les annotations des dessins étaient dans une langue différente de celle de la description, cela n’avait pas d’incidence sur la date de dépôt (les revendications et la description avaient été déposées en allemand, mais les dessins incluaient un texte en anglais).

Quant est-il si une partie de la description ou si une revendication est dans une langue différente du reste de la description ?

Avant l’entrée en vigueur de la CBE 2000, l’OEB refusait l’attribution d’une date de dépôt dans ces situations (J18/96) au motif que la lettre de l’A14 CBE73 était

Les demandes de brevet européen sont déposées dans une de ces langues

Aujourd’hui, la formulation est différente (A14 CBE), mais on peut y retrouver des similarités :

Toute demande de brevet européen doit être déposée dans une des langues officielles ou, si elle est déposée dans une autre langue, traduite dans une des langues officielles, conformément au règlement d’exécution.

Je pense ainsi que la position de l’OEB serait la même : le principe de l’unicité de la langue des demandes de brevet européen serait la règle.

Pour autant, cette unicité ne vise que la description : si les revendications sont dans une langue différente, cela ne pose pas de soucis (Directives A-X 9.2.2, les revendications n’étant pas une obligation pour obtenir une date de dépôt).

Cas d’une divisionnaire

La langue de dépôt d’une demande divisionnaire doit être celle de dépôt de la demande parente ou, au choix, celle dans laquelle la demande a été traduite (R36(2) CBE).

Ainsi, si une demande de brevet européen a été déposée en italien puis traduite en anglais selon les prescriptions de l’A14(2) CBE, il est possible de déposer une divisionnaire en italien ou en anglais.

Procédure écrite devant l’OEB

La règle

Contrairement à une idée reçue, il est possible au demandeur, à l’opposant, etc. d’utiliser n’importe quelle langue officielle de l’OEB (R3(1) CBE et Directives A-VII 2) afin de répondre aux notifications, pour déposer n’importe quelle pièce, etc. (sauf pour les pièces relatives aux modifications de la demande, Directives A-VII 1.2).

En réalité, seul l’OEB est lié par la langue de la procédure (Directives A-VII 1.2).

Dérogation de l’A14(4)

Principe

Si une personne a son domicile (ou son siège social) dans un des États contractants (ou s’il est le national d’un de ces États ayant son domicile à l’étranger) et que celui-ci à une langue officielle autre que l’allemand, l’anglais ou le français, il peut déposer toute pièce devant être produite dans un délai déterminé dans cette langue (A14(4) CBE).

Quand on parle de « une personne » dans le paragraphe précédent, on ignore le mandataire (T145/85).

Cette langue n’est pas forcément la langue de dépôt.

Une traduction doit être remise (A14(4) CBE) au plus tôt simultanément avec la pièce non traduite (G6/91) et dans un délai de 1 mois à compter de la date de remise de la pièce (R6(2) CBE) et non à compter de la fin du délai) dans une des langues officielles de l’office quelque soit la langue de la procédure (Directives A-VII 2).

Cette traduction peut, si le délai suivant expire ultérieurement, être déposée (R6(2) CBE) :

  • dans le délai d’opposition (si la pièce est l’acte d’opposition) ;
  • dans le délai de recours (si la pièce est l’acte de recours) ;
  • dans le délai de dépôt du mémoire de recours (si la pièce est le mémoire de recours) ;
  • dans le délai de présentation d’une requête en révision (si la pièce est une requête en révision).

Attention, car si une personne qui ne peut bénéficier des dispositions de l’A14(4) CBE cherche à déposer un document dans une langue non autorisée en déposant une traduction le même jour, il ne pourra pas argumenter a posteriori que la traduction peut servir d’original : la pièce n’étant qu’une traduction, elle sera réputée n’avoir jamais été produite (T1152/05).

Réduction des taxes

Avant le 1er avril 2014

Si toutes les conditions sont valides pour la pièce essentielle d’une étape de procédure, la personne obtiendra une réduction de taxes de 20 % (R6(3) CBE ensemble A14(1) RRT) pour cette étape.

La pièce essentielle est :

  • la description de la demande pour la taxe de dépôt ;
  • la déclaration précisant la mesure dans laquelle le brevet européen est mis en cause de la R76(2) c) CBE pour la taxe d’opposition ;
  • l’acte de recours (et non le mémoire) pour la taxe de recours ;
  • la requête en examen pour la taxe d’examen ;
  • la requête en limitation ou en révocation pour la taxe de limitation ou de révocation ;
  • la requête en révision pour la taxe de révision ;

Cette réduction est a priori ouverte en cas de déposants multiples (ou de cotitulaire ou de co-opposant, etc.), seul l’un vérifiant les conditions énoncées ci-dessous (voir la lettre de la R6(3) CBE : « une personne« ).

A compter du 1er avril 2014

Néanmoins, pour les demandes déposées (entrants en phase) à compter du 1er avril 2014 (« Décision du Conseil d’administration du 13 décembre 2013 modifiant la règle 6 du règlement d’exécution de la Convention sur le brevet européen et l’article 14(1) du règlement relatif aux taxes » , JO 2014, A4), pour bénéficier de cette réduction, il faudra que tous les déposants soient (R6(4) CBE et R6(7) CBE) :

  • une petite ou moyenne entreprise ;
  • une personne physique ; ou
  • une organisation sans but lucratif, une université et un organisme de recherche public.

Les critères sont donnés dans la recommandation 2003/361/CE de la Commission du 6 mai 2003 (R6(5) CBE).

Les déposants doivent déclarer leur appartenance à une catégorie mentionnée plus haute, mais l’OEB peut demander des preuves en cas de doute (R6(6) CBE).

Le déposant obtiendra une réduction de taxes de 30 % (A14(1) RRT) mais seulement en ce qui concerne :

  • la taxe de dépôt ;
  • la taxe d’examen.

Sanction

Si la traduction prévue à l’A14(4) CBE n’est pas produite dans le délai de 1 mois (ou dans le délai prorogé ci-dessus), la pièce est réputée n’avoir jamais été produite. L’OEB en avertit la personne qui a produit la pièce (Directives A-VII 5).

L’A121 CBE est applicable pour une pièce relative :

  • à la délivrance ;
  • à la procédure de recours ex parte.

L’A122 CBE est applicable à tous les autres cas (sauf pour l’opposant à moins que cela concerne le mémoire de recours, G1/86).

Si la pièce qui n’a pas été traduite est la lettre d’accompagnement d’un acte de procédure (ex. remise d’une copie certifiée d’une demande antérieure), l’acte sera quand même accompli s’il est possible d’identifier le numéro de demande à laquelle il se rapporte (Directives A-VII 5).

Cas particuliers

Observation de tiers

Les observations de tiers (A115 CBE) ne peuvent être déposées que dans une langue officielle de l’OEB (R114(1) CBE) et ne peuvent pas bénéficier des dérogations de l’A14(4) CBE.

En effet, ces pièces n’ont aucune obligation à être remises dans un délai déterminé.

Néanmoins, les Directives A-VII 3.5 prévoit que l’OEB peut inviter le tiers, s’il est identifiable, à fournir une traduction.

Publication

La publication de la demande est faite dans la langue de la procédure (A14(5) CBE).

Modifications de la demande

Les modifications de la demande doivent être déposées dans la langue de la procédure (R3(2) CBE et Directives A-VII 2).

Elles n’ont aucune obligation à être remises dans un délai déterminé et ne peuvent donc pas bénéficier des dérogations de l’A14(4) CBE : En effet, le demandeur n’est pas obligé de déposer des modifications, c’est seulement une possibilité (A123(1) CBE) ; seule une réponse à la notification est obligatoire (A93(4) CBE).

Moyens de preuve

Les moyens de preuves peuvent être produits dans n’importe quelle langue (R3(3) CBE).

Néanmoins, l’OEB peut exiger une traduction dans la langue de la procédure, traduction à produire dans un délai imparti (qui peut dépendre de la longueur du document, Directives A-VII 3). Si la traduction n’est pas produite dans les délais, l’OEB peut ne pas tenir compte de ce moyen de preuve.

Focus sur les traductions

Certifications

Lorsqu’une traduction est nécessaire, l’OEB peut exiger qu’une attestation certifiant que la traduction est conforme au texte original (R5 CBE). Cette attestation doit être remise dans un délai imparti. Ce délai bénéficie de

  • l’A121 CBE pour le demandeur ;
  • l’A122 CBE pour le titulaire et l’opposant pour le cas de la traduction du mémoire du recours G1/86).

Correction de la traduction

Il est possible, à tout moment en cours de procédure, de rendre conforme la traduction au texte de la demande telle que déposée (A14(2) CBE).

Attention, car si cela arrive en cours de procédure d’opposition (ou tout du moins après la délivrance), il ne faut pas être violer les dispositions de l’A123(3) CBE.

Pour la correction des traductions relatives aux pièces déposées dans un délai déterminé (A14(4) CBE), il est nécessaire de procéder à une modification au titre de la R139 CBE.

Procédure orale

La langue de la procédure orale est la langue de la procédure (R4(1) CBE), mais toute partie peut demander à utiliser :

  • une autre langue officielle :
    • Si cette partie informe l’OEB au moins 1 mois à l’avance, l’OEB prend à sa charge la traduction simultanée dans la langue de la procédure (R4(1) CBE ensemble R4(5) CBE) ;
    • Sinon, cette traduction est à la charge de la partie qui le demande (R4(1) CBE) ;
  • une langue officielle d’un État contractant :
    • La traduction dans la langue de la procédure est à la charge de la partie qui le demande (R4(1) CBE).
  • une autre langue (R4(4) CBE)
    • Si l’OEB et les parties sont d’accord.

Cette demande de traduction doit être redemandée au stade du recours (T34/90).

L’OEB peut autoriser certaines dérogations concernant la traduction (R4(1) CBE, notamment si le traducteur est malade est que tout le monde est d’accord pour continuer sans traduction).

Attention : la traduction ne peut être demandée pour permettre à un tiers (ou un de ses employés) d’assister à la procédure orale car il ne comprends pas la langue de la procédure (T2696/16).

Décisions

Les décisions étant un acte de procédure écrite, ce qui a été dit plus haut s’applique.

Seule une décision dans une seule langue de procédure répond aux exigences de la R111(2) CBE concernant la motivation des décisions. 

Ainsi, il n’est pas possible de reprendre des passages du mémoire d’opposition en langue anglaise (et sans traduction) dans une décision rendue en allemand (T1787/16).

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